Greenpeace accuse la BCE d’aider les gros pollueurs avec un transfert de garantie


Les militants écologistes ont critiqué le récent assouplissement par la Banque centrale européenne de ses règles de garantie pour bénéficier de manière disproportionnée aux entreprises qui sont de gros émetteurs de carbone, telles que les compagnies aériennes et les constructeurs automobiles.

La BCE a modifié ses règles de garantie en réponse à la pandémie il y a près d’un an pour commencer à accepter des titres émis par des sociétés «anges déchues» – celles dont la note de crédit a été abaissée en dessous de la note d’investissement depuis le début de la crise des coronavirus.

Greenpeace a déclaré que la modification temporaire des règles avait principalement profité aux gros pollueurs, notamment Lufthansa, International Airlines Group et Renault, selon un rapport consulté par le Financial Times.

La quatrième société qui a bénéficié de ce changement a été Technip, le groupe de services pétroliers, ne laissant qu’un seul bénéficiaire que Greenpeace ne considérait pas comme un émetteur à forte émission de carbone: Adler, le groupe immobilier allemand.

«Le fait que ces actifs soient particulièrement intensifs en carbone n’est pas surprenant: après tout, ce sont précisément ces modèles commerciaux qui subissent la pression de la transition vers une économie nette zéro», a déclaré Greenpeace.

« La tâche de la BCE ne doit pas être de soutenir aveuglément ces entreprises, mais de trouver un moyen de corriger le plus rapidement possible le déséquilibre climatique de ses instruments de politique monétaire », a ajouté le groupe de campagne. «Ce n’est qu’ainsi que la voie acceptée politiquement et socialement souhaitée vers la neutralité climatique pourra réussir.»

Greenpeace a fait valoir qu’en modifiant ses règles pour permettre aux obligations des «anges déchus» d’être éligibles en tant que garantie, la BCE avait montré une «incohérence significative» dans la manière dont elle applique son principe de neutralité du marché qui vise à éviter de fausser le prix relatif des titres.

La BCE a refusé de commenter le rapport, bien que les responsables aient souligné le fait que seulement 3 pour cent de ses garanties sont constituées d’obligations de sociétés, ce qui signifie que le changement de règle a eu un impact relativement faible.

La banque centrale hésite à peindre les obligations en marron ou en vert, car une entreprise peut utiliser le produit d’une émission obligataire pour financer sa transition vers un modèle économique moins intensif en carbone, par exemple un constructeur automobile investissant dans le développement de batteries électriques.

Christine Lagarde, présidente de la BCE, a déclaré dans une lettre récente aux députés: «Hormis dans des cas spécifiques où l’utilisation du produit est spécifiée (comme par exemple dans le cas des obligations vertes), les titres de créance éligibles fournissent un financement à des fins générales et ne sont pas destinés à financer des actifs ou des secteurs d’activité individuels. »

«Par conséquent, déterminer un éventuel impact environnemental sur la base de données rétrospectives et sectorielles ou au niveau de l’entreprise pourrait être trompeur», a-t-elle ajouté.

La question de savoir si la BCE doit utiliser ses outils de politique monétaire pour remédier à la mauvaise évaluation du risque climatique est apparue comme l’un des domaines les plus controversés de la révision par la banque centrale de sa propre stratégie, qui doit s’achever en septembre.

Les militants ont ciblé les 270 milliards d’euros d’achats d’obligations d’entreprises par la BCE pour renforcer le biais du marché en faveur des gros émetteurs de carbone tels que les sociétés pétrolières et gazières, les services publics et les compagnies aériennes, car ces secteurs émettent beaucoup plus d’obligations que la plupart des autres.

Dans un rapport récent, Greenpeace et d’autres groupes ont également attaqué le cadre de garantie de la BCE, soulignant que 59% des 1,6 milliard d’euros d’obligations d’entreprises éligibles à l’utilisation sont émis par de gros émetteurs de carbone – dépassant de loin leur part d’emplois ou de production économique.

François Villeroy de Galhau, gouverneur de la banque centrale française, a récemment appelé la BCE à ajuster le montant des obligations d’entreprises qu’elle achète et la valeur des garanties qu’elle accepte en fonction de l’alignement des entreprises sur l’atteinte de zéro émission nette d’ici 2050.

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