Automobile / Sport mécanique électrique. Les Formula E font-elles progresser nos voitures électriques?


Samedi peu avant 16 heures, sur la ligne de départ de E-Prix de Monaco, Tommaso Volpe reconnaît avoir mal géré son «énergie vocale». Le directeur du sport automobile de Nissan en convient, dans un sourire, la voix cassée! Allusion à l’autonomie des deux Nissan E-Dams, pilotées par l’anglais Oliver Rowland et le suisse Sebastien Buemi (1). Parce que c’est un élément clé de la course. Les voitures vont aborder un circuit difficile, des adversaires affamés et tous confrontés à la même difficulté: finir. Et si possible en un seul morceau.

Ces «formule 1» électriques sont très proches les unes des autres. «Ici, après les essais, il y a vingt voitures dans la même seconde. En F1, c’est cinq… », explique Tommaso Volpe, comporte les contraintes imposées par un règlement drastique, qui oblige à développer dans un mouchoir de poche.

Juste avant la course, nous lui avons demandé ce qui rapproche ces voitures de course de nos véhicules électriques, désormais répandus, et construits à peu près sur le même modèle: une batterie, un moteur, des roues, un volant…

Pour Tommaso Volpe, directeur du sport automobile chez Nissan, l'avenir n'est ni à la puissance des moteurs ou des batteries, ni à la conduite autonome.  Mais à la possibilité, grâce aux logiciels et à la flexibilité des technologies électriques, de tout combiner pour s'adapter à chaque utilisation.  Ne rien faire quand c'est pénible, éviter les accidents, et conduire quand c'est agréable… Photo SP / Nissan
Pour Tommaso Volpe, directeur du sport automobile chez Nissan, l’avenir n’est ni à la puissance des moteurs ou des batteries, ni à la conduite autonome. Mais à la possibilité, grâce aux logiciels et à la flexibilité des technologies électriques, de tout combiner pour s’adapter à chaque utilisation. Ne rien faire quand c’est pénible, éviter les accidents, et conduire quand c’est agréable… Photo SP / Nissan

Nissan est en Formule E depuis 2018. Quelles ont été les évolutions que vous avez pu intégrer à vos voitures électriques grand public?

Nissan a effectivement commencé en 2018. Les premières années ont consisté à transférer la technologie dans la direction opposée. Nous avons pris l’expérience du logiciel de gestion d’énergie de la Feuille vers la E. Surtout, nous avons confirmé que nous restions engagés jusqu’en 2026. Notre objectif est désormais désormais de transférer l’expérience de la Formule E vers nos voitures de route. Il faut savoir que la Formule E est un prototype où tout le monde partage la même plateforme. Mais on peut travailler sur les transmissions, le moteur et la boîte. Et c’est important parce qu’on a fait le focus sur des éléments transférables. On ne peut pas transférer le châssis et l’aérodynamique par exemple, mais on peut s’inspirer du moteur et du logiciel de gestion de l’énergie. Cela permet de travailler sur l’usage en ville, sur route, à la campagne…

Et pourquoi ne pas envisager une «supercar» électrique Nissan? Il y a bien la GTR…

La technologie électrique est extrêmement flexible. La puissance du moteur est fixe, mais la qualité intrinsèque vient de la façon dont on l’utilise. Sur l’Ariya par exemple (le nouveau crossover Nissan présenté jeudi au salon Ever de Monaco –lien vers l’article sur le salon Ever -), on peut utiliser la voiture comme un SUV, une familiale, et aussi comme une voiture très performante . Ce qui est utilisé en puissance, peut aussi être utilisé pour des besoins quotidiens avec une grande facilité. Qui peut le plus peut le moins. Parce que sur un moteur classique, on peut bien sûr changer beaucoup de choses, mais la puissance émise est celle qui est décidée à la base. On ne peut pas le changer. Avec un moteur électrique, il suffit d’avoir un logiciel différent et tout changer. C’est qui l’usage prime sur l’ADN.

Qu’est-ce qui change le plus pour un patron d’écurie quand on dirige une compétition de bolide électrique par rapport à des voitures thermiques?

Les moteurs thermiques sont de plus en plus efficients. Nous ne les éliminons pas. Mais bien sûr, les moteurs électriques sont autrement plus efficaces. A titre d’exemple, la quantité d’énergie transformée en traction de façon la plus optimale atteint 30 à 35% pour un thermique. Le reste, c’est du bruit et de la chaleur. Pour les moteurs électriques, on cherche à atteindre 100%, avec cette souplesse due à la gestion par le logiciel: le couple, l’accélération instantanée, etc.

Notre obsession est donc l’atteinte de 100% de rendement, et la gestion de l’énergie pure. On gagne si on réussit dans ces deux compartiments du jeu. Et il y a une partie de cours pure avec de bons pilotes justes et de la stratégie. Ces points-là ne changent pas.

Quelle sera l’évolution la plus spectaculaire pour nos voitures de demain?

Chez Nissan, nous appelons déjà cela «Mobilité intelligente». Le plus fascinant sera la possibilité d’intégrer tout un système de mobilité en tant que tel. Nous pourrons l’électrification, la connectivité avec l’environnement immédiat et une plus grande autonomie (2). Il n’y a pas une seule technologie mais la possibilité de coordonner quelque chose les trois pour arriver à choisi de plus facile, de plus excitant. Ne pas conduire quand c’est désagréable, éviter les accidents, et maximiser la gratification pour conduire librement là où on le peut. Ce sera cela, l’évolution la plus importante.

(1) Rowland a terminé 6e et Buemi 12e. La course a été remportée par le portugais Da Costa (DS Techeetah) dans le dernier tour, devant le hollandais Robin Frijns (Envision Virgin Racing) et l’anglais Mitch Evans (Jaguar racing).

(2) Il faut lire conduite autonome, et Nissan n’envisage pas d’autonomie complète à date, c’est-à-dire de voiture qui ne se conduit pas.

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