Romain Grégoire : « Le plaisir dicte tout » – Actualité


Se lancer dans des qualificatifs pour décrire la saison 2021 de Romain Grégoire pourrait s’avérer être périlleux et hasardeux, tant le double Champion de France, Champion d’Europe et vice-Champion du Monde a été bluffant tout au long de l’année. Archi-dominateur au niveau national mais également parmi tous les meilleurs mondiaux, le Doubiste – qui réside précisément dans la toute petite commune de Velesmes-Essarts – a profité de sa coupure pour revenir sur cette folle saison avec DirectVélo. Sans oublier, bien sûr, d’aborder son arrivée au niveau professionnel avec la Conti Groupama-FDJ et, à plus court terme, son retour dans les sous-bois pour contester quelques cyclo-cross. Entretien.

DirectVelo : Réalises-tu ce que tu viens d’accomplir ces douze derniers mois, depuis ton premier titre de Champion de France Juniors en octobre 2020 ?
Romain Grégoire : Je pense réaliser ce que j’ai fait, oui. Par contre, je ne suis pas sûr de réaliser quelle image je renvoie auprès des autres. Je suis conscient d’avoir fait de belles choses et je suis très fier de moi. Mais quand je vois l’engouement qu’il y a autour de moi, que ce soit dans toutes les félicitations que je peux recevoir ou par rapport à l’aspect médiatique, je n’ai pas l’impression de mériter tout ça.

Les attentes et la pression maintenant d’être énormes…
Je me faisais la réflexion il y a encore peu. Je me dis que ça peut être positif car si jamais je suis amené, un jour, à devenir un grand coureur, j’aurai pu me préparer très tôt à cette situation-là, à vivre avec cette pression, cet engouement médiatique. Mais d’un autre côté, c’est vrai que ça fait peur. Si ça se passe mal sur le vélo, ce sera peut-être plus compliqué à vivre. C’est à moi de me préparer aux deux possibilités et à prendre du recul, pour ne pas prendre les choses trop à cœur. Je dois rester focalisé sur mon travail et ma progression.

En 2021, tu as écrasé le Challenge MorphoLogics-DirectVelo Juniors en explosant le record du nombre de points. Tu comptes treize victoires dont deux titres de Champion de France (route et CLM), un titre de Champion d’Europe et une médaille d’argent au Mondial. As-tu l’impression d’avoir quelque chose de choisi de plus que la plupart de tes adversaires ?
Non. Je ne me dis pas du tout que c’est acté pour la suite de ma carrière. Rien n’est acquis. Cette vision-là ne m’est jamais passée par la tête. Au contraire. Je me dis simplement que je marche bien parce que je suis déjà très rigoureux chez les Juniors. Cette année, j’ai fait des choses que la plupart des autres Juniors ne peut-être pas. Je pense notamment à l’intensité des entraînements ou à la durée de certaines sorties. Au niveau du volume d’entraînement, j’en ai fait beaucoup. Cette année, j’avais aussi un préparateur mental à ma disposition grâce au comité. J’ai pu faire une dizaine de séances et ça m’a aidé. Mais il y a plein d’autres gains marginaux que je pourrai aller chercher plus tard. Je suis loin d’être au maximum de mes capacités. Et tant mieux car en Conti, ce sera autre choisi, et je ne suis pas sûr du tout de pouvoir faire la décision de la même façon que cette saison. Je sais qu’il me reste énormément de travail à accomplir. J’en ai conscience. J’ai fait les choses bien pour garder une marge de progression et être le meilleur possible chez les pros.

« JE NE VOULAIS PAS ME RATER, IL FALLAIT HONORER LE MAILLOT »

Tu évoques un volume d’entraînement déjà conséquent chez les Juniors. On dit de plus en plus souvent qu’il faut faire attention à ne pas se “cramer” dès cette catégorie d’âge-là. Commentaire t’es-tu assuré de ne pas en faire trop ?
Le plaisir dicte tout. J’ai pris l’habitude de rouler correctement, plus que les autres Juniors, mais j’ai aussi fait attention à bien récupérer. Disons qu’en faisant régulièrement de grosses séances à l’entraînement, je m’y suis habitué. Et je l’ai bien vécu. Il n’y a pas eu de lassitude physique ni mentale. Au contraire, j’étais content de pouvoir rajouter du volume au fur et à mesure, faire plus d’heures de vélo de temps en temps. Ce n’était jamais une contrainte. Et c’est comme ça que j’ai réussi.

Si tu t’es beaucoup axé sur l’entraînement, c’est aussi parce qu’à cause de la Covid-19, tu fais partie de cette génération de Juniors qui a longtemps été privée de la moindre compétition l’an passé…
Exactement, m’a permis de me concentrer sur mes entraînements. J’ai pu travailler comme il faut. J’ai pu me poser et me fixer des séances spécifiques alors que jusque-là, j’étais un peu partout à la fois avec les cours sur route et le cyclo-cross. Depuis, j’ai gardé cette rigueur et ce rythme de travail.

Y at-il une course, ou un événement en particulier, qui t’aurait fait réaliser que tu ferais une belle carrière dans le cyclisme ?
Le Championnat de France de l’an passé, parce que ça a été un boost énorme. Gagner le Championnat et faire toute la saison 2021 avec le maillot bleu-blanc-rouge m’a donné envie de beaucoup travailler durant la trêve hivernale. Je ne voulais pas me rater, il fallait honorer le maillot. Je me suis mis pas mal de pression en début d’année en me disant que si je ne gagnais pas avec le maillot, ça craignait. La Classique des Alpes a été importante aussi, d’une autre façon, car j’y ai pris une grosse claque. Du coup, ça m’a reboosté, j’ai eu envie d’en faire encore plus pour ne pas reprendre ce genre de claque.

« J’AI ENCORE PAS MAL DE LACUNES »

Chez les Juniors, tu as brillé sur des terrains divers et variés. Quel type de coureur pense-tu devenir à terme ?
Les courses qui me font rêver, ce sont les Grands Tours et des Classiques comme Liège-Bastogne-Liège, avec des efforts intenses sur quatre-cinq minutes. Je ne vais pas être très original en disant ça, mais en gros, un coureur du profil de Julian Alaphilippe me fait rêver. Je sais que pour jouer les classements généraux, il va falloir que je m’améliore dans les longs cols mais aussi sur des contre-la-montre tout plats. J’ai encore pas mal de lacunes. Mais j’ai des capacités de récupération que je trouve intéressantes. J’espère l’exprimer à terme.

En parlant de montagne, tu es imposé au Valromey cette saison !
C’est intéressant. Mais justement, j’ai senti que dans les longs cols comme le Grand Colombier, j’étais un petit peu en-dessous des meilleurs grimpeurs. Par contre, au niveau de la récupération, ça allait très bien et j’ai réussi à faire la différence le dernier jour. Mais dans un premier temps, je n’ai pas envie de me spécialiser sur le travail en montagne. Chez les Espoirs, je suis persuadé qu’il faut tout travailler. Y compris ce qui ne me convient pas ! Je pense aux cours sur les pavés, en Belgique, par exemple. Ce n’est pas mon point fort mais j’adorerais y aller. Il faut tout découvrir. Je me spécialiserai plus tard mais j’ai encore le temps. Tout va être nouveau en 2022. Je pense aussi avoir des surprises et me découvrir d’autres qualités. Je ne me ferme aucune porte.

On t’a d’abord découvert en cyclo-cross, avant que tu n’exploses sur la route (voir son parcours). L’hiver dernier, tu avais délaissé les sous-bois à cause d’un calendrier trop incertain mais tu y as fait ton retour ces dernières semaines…
Oui ! J’avais très envie de retrouver les cross après avoir pris le temps de marquer une bonne coupure. Je n’avais pas d’objectifs de résultats en cross cet hiver mais simplement l’envie de me faire plaisir. C’est une discipline qui me manquait. Quand je voyais les photos passer sur les réseaux sociaux, des mecs sur les cross, au début de l’automne… J’étais un peu dégoûté de ne pas y être (rires). Franchement, ça me désire envie et je suis heureux d’avoir retrouvé les compétitions en cyclo-cross.

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