Opinion : Éric Zemmour menace de bousculer la présidentielle en France


Le commentateur français d’extrême droite Eric Zemmour retient beaucoup l’attention.ERIC GAILLARD/Reuters

Les courses présidentielles françaises sont généralement pleines de surprises.

Les deux précédents, en 2012 et 2017, ont abouti à des résultats que personne n’aurait prédit six mois avant le vote. Et la course 2022 a déjà produit son lot de rebondissements, ou des rebondissements, alors qu’une douzaine ou plus de candidats officiels et non officiels se disputent le poste.

Aucun candidat potentiel au palais de l’Élysée n’attire plus l’attention en ce moment qu’Éric Zemmour, un essayiste et ancien présentateur de nouvelles du câble qui déverse des opinions incendiaires sur l’immigration, l’islam et le passé collaborationniste de la France. Ses rivaux craignent que M. Zemmour ne soit pas qu’un autre grande gueule, ou grande gueule, mais une vraie menace.

M. Zemmour, qui a appelé à l’expulsion de deux millions d’immigrés et à l’interdiction des prénoms « non français », a déjà été condamné à une amende par un tribunal français pour « provocation à la haine raciale » et fait face à encore plus d’accusations de ce genre. Mais cela n’a fait que l’encourager, alors que ses fans réclament qu’il s’engage officiellement dans la course.

Le soutien à M. Zemmour a doublé au cours du mois dernier pour atteindre entre 13% et 15%, selon les sondages publiés ces derniers jours, le plaçant à une distance frappante de renverser la leader du Rassemblement national Marine Le Pen au premier tour de scrutin. le vote du printemps prochain.

Seuls les deux premiers au premier tour passent au second tour des élections. Les sondages montrent que le président sortant Emmanuel Macron, qui n’a pas encore officiellement annoncé sa candidature, est en tête du premier tour avec environ 24% des voix. Mais, selon qui accède au second tour, il n’est pas assuré de la victoire.

M. Macron préférerait affronter Mme Le Pen au second tour, comme il l’avait fait en 2017, lorsqu’il avait remporté 66% des voix contre 34%. Des électeurs de tous horizons se sont ralliés à M. Macron, un ancien socialiste qui a créé son propre parti politique pour lancer sa candidature présidentielle, pour empêcher l’extrême droite Mme Pen de s’approcher de l’Élysée.

Depuis, la stratégie de Mme Le Pen pour « détoxifier » le NR marque a produit des résultats mitigés. Elle a nettement atténué sa rhétorique anti-immigration et parle désormais davantage de protéger les emplois et les retraites de la classe ouvrière que d’expulser les migrants. Ses tentatives pour projeter une image plus douce n’ont cependant pas été bien accueillies par les supporters inconditionnels de NR, qui l’accusent de les abandonner.

Dans cette brèche est entré M. Zemmour. Longtemps un incontournable des cours de bavardage français, l’essayiste de 63 ans a atteint une notoriété nationale grâce à son rôle d’animateur de sa propre émission sur CNews, la version française de Fox News. Il a récemment perdu ce concert au milieu de spéculations selon lesquelles il se préparait à lancer une candidature présidentielle. Mais il n’avait plus besoin de l’exposition, de toute façon.

Ces dernières semaines, le visage de M. Zemmour a été éclaboussé sur les couvertures de magazines et les panneaux d’affichage partout en France alors qu’il faisait la promotion de son nouveau livre, La France n’a pas dit son dernier mot (La France n’a pas dit son dernier mot). Il a même fait la couverture de Paris Match, qui le montrait gambader dans la mer avec un assistant de 28 ans.

Les observateurs ont noté que Mme Le Pen n’avait jamais fait la couverture du magazine à potins, surtout connu pour ses photos sur papier glacé de stars de cinéma et d’aristocrates français. Beaucoup ont conclu que c’était un signe que l’attrait politique de M. Zemmour s’étend au-delà de l’extrême droite aux électeurs bourgeois de la droite française traditionnelle. Après tout, il privilégie des politiques économiques libérales plus conformes à celles du parti de centre-droit Les Républicains qu’à celles populistes promues par le Rassemblement national.

Cela fait de M. Zemmour une menace non seulement pour Mme Le Pen, mais pour Xavier Bertrand, qui est favori pour devenir le candidat présidentiel des Républicains. M. Bertrand a quitté le parti en 2017, mais a indiqué qu’il serait prêt à revenir – à condition que les membres acceptent de le couronner comme candidat lors d’un congrès en décembre.

Les sondages montrent que M. Zemmour a drainé le soutien presque également de Mme Le Pen et de M. Bertrand. Tous les trois sont désormais au coude à coude, suggérant que l’un d’entre eux pourrait obtenir une place au deuxième tour de scrutin en mai.

Alors qu’une opposition divisée peut sembler jouer en faveur de M. Macron, cela pourrait également compliquer son chemin vers sa réélection, car il repousse attaques de trois rivaux de droite et de plusieurs candidats de gauche et d’extrême gauche. Le président, qui avait auparavant ignoré M. Zemmour, a critiqué la semaine dernière l’ancien animateur de CNews, affirmant que l’identité de la France n’était pas fondée sur les prénoms, une référence à l’affirmation de M. Zemmour selon laquelle « nommer son enfant Mohamed revient à coloniser la France. « 

Du coup, la perspective d’une bataille pour le second tour Macron-Zemmour ne semblait plus si farfelue.

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