Le racisme, ça fait mal


Le racisme fait mal. L’eau bout à 100 degrés et les oiseaux volent dans le ciel, allez-vous me répondre en bons agents des vérités de La Palice que vous êtes. Mais le racisme fait mal. Normalement, si tu es encore pourvu d’empathie et que tu as réussi, malgré les souffrances de la vie, à ne pas t’enfermer dans une carapace de sociopathe, le racisme que tu observe, mais ne subis pas, te révolte. Cela dit, il te ferait 1 000 fois plus mal s’il était adressé.

Toujours avec votre regard affûté, vous avez remarqué que je suis une femme blanche. Je ne suis pas née au Burkina Faso, mais à Montréal, dans une ville où être blanche me plaçait automatiquement dans la majorité. J’ai beau être une hybride France-Québec, les sociétés où j’ai vécu dans mes deux pays m’ont valu quelques moqueries sur mon accent (qui se module), mais jamais sur la couleur de ma peau.

Je viens d’une lignée de juifs qui s’est arrêtée à mon arrière-grand-père paternel, qui a marié une catholique. Les Stréliski ont malgré tout été persécutés pendant la Deuxième Guerre mondiale: mon grand-père a été caché, son père s’est retrouvé dans un camp de concentration, mais il n’y est pas mort. Contrairement à d’autres Stréliski qui, eux, figurant dans les registres d’Auschwitz.

Voilà à peu près l’histoire du racisme ou de l’antisémitisme subi par ma famille. SAUF. Sauf que je suis une francophone née dans un pays où la majorité est anglophone. Je suis, par ma mère, bien québécoise, lieu au monde ici et issue d’une famille traditionnelle québécoise nombreuse de fermiers abitibiens. Mes 12 000 cousins ​​sont pour la plupart encore dans cette région, mon oncle (un Maurice Richard!) A représailles la ferme familiale avec ses fils. Je suis donc aussi très francophone.

Je regarde le hockey. Je « streame » le hockey en fait, les oreilles de lapin de ma télé n’étant pas assez puissantes pour moi faire voyager dans le temps et me redonner La soirée du hockey. Sur le site en question, on peut clavarder en direct. Avec les autres garçons qui regardent la partie. Qui regardent LES parties en fait, car c’est un discuter pour tous les matchs de la LNH qui se déroulent en même temps. Si tu veux une belle fenêtre sur le racisme envers les francophones québécois, je te conseille de t’aventurer sur ce genre de sites. C’est instantané. Ça fait plusieurs fois que je l’observe, ce n’est donc pas anecdotique. C’est absolument à tout coup et systématique. (Pour ne pas dire systémique, bonhomme clin d’œil.) Dès qu’un francophone émet un commentaire sur la partie, quelqu’un répond que le français n’a pas sa place ici, que parler français ne sert à rien… On se moque de notre langue (j’ai lu que ça sonnait comme de la diarrhée, etc., etc.). Bien sûr, d’autres anglophones traitent ces gens-là de tous les noms, j’ai vu un monsieur rétorquer qu’il y avait assez de cons dans le monde, qu’on n’en avait pas besoin dans cet espace…

Il n’en reste pas moins que chaque fois, je n’y peux rien, ça me fait mal. Je trouve ça archaïque de penser comme ça. Je pourrais reparler de notre bon professeur de l’Université d’Ottawa, M. Amir Attaran, qui fait visiblement une fixation personnelle sur le Québec, peut-être parce que, selon lui, il a été victime d’un comportement raciste qui l ‘une privé d’une promotion en 2016. La nation québécoise, qu’il considère comme pathologiquement raciste, lui rappelle peut-être ce genre d’échec. Je n’en sais rien, je ne suis pas sa mère.

Mais à mon avis, on peut comprendre que les francophones soient écorchés et que ça réveille leurs fantômes. Les francophones ont aussi des blessures béantes, de mauvais souvenirs d’opprimés et une histoire qui leur donne, bien sûr, le réflexe de se replier sur eux-mêmes, de protéger leur culture et de lutter contre les méchants anglais. C’est donc normal qu’on soit scandalisé par les propos d’un amer Attaran et que celui-ci soit dénoncé.

Cela dit, le fait que nous ayons juste été victimes d’injustices ne devrait-il pas, au contraire, nous rendre plus accueillants? Le Québec pourrait devenir le champion des enjeux de racisme au Canada, on devrait comprendre mieux que les autres provinces ce sentiment odieux d’être persécuté sur la base absolument gratuite d’un trait de notre identité. Avec cela en poche, on serait en mesure de devenir un modèle d’inclusion et de lutte antiraciste. Des pionniers dans le domaine. Et si ce n’était que pour faire un pied de nez aux imbéciles qui se moquent de nous, prêcher par exemple dans une société accueillante où il fait bon vivre serait la meilleure des vengeances.

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