Chaleur : vers de possibles records en début de semaine prochaine


La Chaîne Météo : Depuis plusieurs semaines, les variations de températures que nous connaissons sont importantes. Qu’est-ce qui explique ce yo-yo de nos thermomètres ?

Pascal Scaviner : Rappelons que les intersaisons sont des périodes propices à ces variations. Il faut néanmoins reconnaître que celles-ci ont parfois été fortes depuis le début de septembre et qu’il est nécessaire de s’attarder un peu sur les explications.

La raison principale est liée à l’anticyclone des Açores, cette cellule de hautes pressions qui joue un rôle fondamental dans le climat de l’Europe. Quand il s’étend sur le pays en été, il apporte un temps sec et ensoleillé tandis qu’en hiver, lorsqu’il régresse sur l’archipel des Açores, il laisse majoritairement le passage aux perturbations atlantiques et aux précipitations. Entre ces deux saisons, son évolution peut présenter des anomalies parfois fortes, comme c’est le cas depuis le 9 septembre. On a ainsi observé 3 périodes distinctes.

De la fin août jusqu’à la mi-septembre, l’anticyclone est resté majoritairement centré au sud de l’archipel des Açores. Par sa position, il a laissé les dépressions océaniques circulaires en direction de la France et apporte de la douceur dans un flux de sud-ouest.

À partir du 15 septembre, son extension vers l’Islande puis la Scandinavie a obligé les dépressions des hautes latitudes à se déplacer par le nord avant que ces dernières ne plongent sur l’Europe. Le flux s’est orienté au nord-ouest jusqu’au 1er octobre et cette descente d’air froid à fait chuter les températures moyennes. Elles sont restées 15 jours en dessous des normales, ce qui n’était plus arrivé depuis la fin mars 2022.

début octobre, l’anticyclone a montré des signes de faiblesses permettant à de nouvelles perturbations de traverser l’hexagone. Mais ces faiblesses n’ont été que temporaires, car après le passage des perturbations, il s’est de nouveau, mais cette fois-ci en direction de la France.

Ce sont donc les fluctuations de l’extension de l’anticyclone qui sont responsables de cette météo à yoyo. Elles ont généré des périodes douces durables, entrecoupées de périodes froides. Tant que ces fluctuations restent de faible importance, les variations de températures ne sont que le reflet de la variabilité naturelle du climat. Dans le cas contraire, elles témoignent davantage du changement climatique. Des études parues dans la revue Nature Geoscience ont montré que cette extension anormale de l’anticyclone des Açores tend à s’accroitre. Elle devrait être récurrente et plus longue sur l’Europe de l’Ouest durant les prochaines décennies.

Dans le contexte actuel d’économie d’énergie, les températures sont un paramètre surveillé de très près par les Français. Est-ce que le coup de chaud que vous annoncez depuis le début de semaine se confirme pour lundi et mardi prochain ?



Crédit : La Chaîne Météo

Oui. L’analyse des modèles les plus performants confirme l’installation d’un flux de sud à partir de dimanche, dans les basses et hautes couches de l’atmosphère. La fiabilité est de 70 %, même à une échéance de 6 jours. L’anomalie de température prévue à 850 hPa, autour de 1500 mètres, ira ainsi jusqu’à 8 à 12 °C sur le sud lundi et/ou mardi prochain. La température moyenne sur le pays, qui est actuellement de 15 °C, va progressivement augmenter pour atteindre 18 à 19 °C, soit plus de 5 °C au-dessus des normales.

Ce coup de chaud va jouer à la fois sur les températures du matin qui seront plus élevées, mais aussi celles de l’après-midi. Les amplitudes seront moins fortes. Est-ce qu’il faut s’attendre également à des records ?

Notre indicateur thermique montre que la température moyenne au niveau national attend des enregistrements en début de semaine prochaine. Avec près de 19 °C en moyenne prévue sur le pays, les journées de lundi ou mardi pourraient être les plus chaudes depuis 1988 ou 2014. La probabilité de battre des records de chaleur journaliers sur certaines villes est également élevée, mais très faible voir nulle pour les enregistrements mensuels. Le sud-ouest est la région la plus exposer pour battre des records quotidiens. Ce pourrait être surtout le cas pour les communes situées sur le piémont pyrénéen bénéficiant de l’effet de foehn.

Est-ce une situation « anormale » due au réchauffement climatique ou cela s’explique-t-il par la variabilité naturelle du climat ?

Comme nous l’avons rappelé, l’explication est liée à une variabilité parfois exacerbée du climat qui s’observe dans un contexte de réchauffement climatique. Ce que l’on observe, c’est que ces météos extrêmes deviennent plus fréquentes. La circulation générale sur l’Atlantique Nord a ainsi évolué ces deux dernières décennies, en limitant la fréquence de la circulation océanique. L’évolution de l’anticyclone des Açores joue moins son rôle de régulateur. Ces fortes variations ne font qu’augmenter.

Laisser un commentaire