4 trucs pour bien gérer des employés à distance


Ces derniers mois, quatre recrues ont quitté Go RH, un cabinet de services-conseils en ressources humaines et en recrutement établi à Québec. Ces employés étaient dans la vingtaine et travaillaient à Montréal, l’une des huit antennes de la PME de 75 employés (les autres sont réparties à Magog, à Drummondville, à Chicoutimi, à Alma, aux Îles-de-la-Madeleine ainsi qu ‘à Paris et à Vannes, en France). Ils sont tous partis pour la même raison : ils ne supportaient plus d’être 100 % du temps en télétravail.

C’est que la PME née en 2017 présente la particularité de ne pas avoir de bureaux, à l’exception du siège social de Québec. Ses antennes correspondantes, en vérité, à des équipes régionales pilotées à distance par un responsable local. Chaque consultant est autonome dans son travail, c’est à lui de gérer seul ses dossiers et ses clients, « comme il le veut, d’où il le veut, quand il le veut ». Le seul point de rendez-vous avec l’équipe de sa région est virtuelle et hebdomadaire. « Nous fonctionnons très bien sans bureaux, même s’il est vrai que l’aspect social du travail peut parfois en pâtir », estime le président et cofondateur Sylvain Roy.

Ou, c’est cet aspect qui a déclenché le départ des quatre employés. « Chacun d’eux m’a expliqué qu’il aimait travailler chez nous, mais qu’il souffrait de ne pas pouvoir socialiser avec ses collègues dans un bureau », raconte-t-il.

C’est justement pour combler cette carence que Go RH a mis en place au fil des ans plusieurs mesures visant à favoriser la motivation, la collaboration et le bien-être des employés, malgré la distance qui les sépare. Ainsi, Sylvain Roy a pour habitude d’envoyer, de temps à autre, un texte à chacun de ses employés. Une question simple : « Comment ça va ? » Le président n’attend pas de réponse immédiate, mais elle vient souvent très vite. « Un texto pareil, ça n’a l’air de rien, mais ça fait un bien fou à ceux qui le reçoivent », affirme-t-il, en précisant qu’en mode télétravail, « il est vital que le patron se soucie vraiment des autres ». Cela peut aussi permettre au président de découvrir une épine inattendue fichée dans le pied d’un employé : un bogue technologique récurrent, un souci familial qui empiète sur le quotidien au travail, etc.

Outre le texte du président, Go RH recourt à des gestes plus élaborés pour maintenir la motivation des troupes. L’un d’eux consistait en un sondage mené tous les six mois auprès de l’ensemble des employés. L’idée est d’évaluer différentes pistes d’amélioration des pratiques managériales de l’entreprise. « Si la majorité des employés dit qu’il faut faire ci et arrêter de faire ça, pas de problème, on change ! Même si j’étais, moi, partisan du ci », dit Sylvain Roy, en écoutant qu’il est toujours stimulant pour un employé d’avoir le sentiment d’être écouté.

L’esprit d’équipe et la collaboration se cultivent aussi à Go RH par l’intermédiaire de l’application de messagerie Slack. Chacun peut intervenir librement dans l’un des 50 canaux de discussion réservés aux employés. Pour faire partie d’un bon coup, demander de l’aide ou encore publier un truc rigolo qui mettra les autres de bonne humeur. « Slack est le cœur de notre organisation. L’information circule bien à l’interne et le « corps » tout entier a l’énergie nécessaire pour donner son 110 % », résume le président de la PME qui compte parmi ses clients le constructeur de véhicules lourds Lion Électrique, la quincaillerie Richelieu et la papetière Domtar.

Quant au bien-être, il passe notamment par une initiative inusitée lancée en mars dernier : la possibilité pour chaque employé de travailler durant une semaine dans un condo haut de gamme situé à Saint-Ferdinand, dans le Centre-du-Québec. La vue donne sur le lac William. Quand on s’accorde une pause, on peut en profiter pour aller y faire un tour en kayak ou en planche à pagaie. Et rien n’empêche, ça va de soi, de passer cette semaine-là avec sa petite famille, en prenant des jours de congé. « Ce condo m’appartient, je le loue pour une somme modique aux employés intéressés », dit Sylvain Roy. La formule est populaire, puisque 26 semaines ont été réservées en 2021.

Bref, Go RH a certes perdu une poignée d’employés réfractaires au télétravail, mais la PME a vu ses affaires fleurir grâce à ses innovations visant à rendre agréable le travail à distance pour les autres. Une donnée en témoigne : en début d’année, les prévisions financières de Go RH tablaient sur une croissance du chiffre d’affaires de 55 % en 2021 ; elle devrait « dépasser les 200 % » à la fin de l’année, révèle le président.

Le cas de Go RH montre que le télétravail peut s’avérer une manière efficace de fonctionner pour une PME. À cet égard, Catherine Privé, présidente et chef de la direction d’Alia Conseil, un cabinet en développement organisationnel établi à Montréal, à Québec et à Saguenay, préconise de suivre quatre règles pour optimiser le télétravail.

1. Faire confiance

Auparavant, les gestionnaires étaient habitués à « voir » les employés, explique Catherine Privé. À jaser avec eux au détour d’un couloir, à les rencontrer en personne dans leur bureau, à noter d’un simple coup d’œil s’ils allaient bien ou pas. Mais à distance, ce n’est plus possible. Et le mauvais réflexe, estime-t-elle, est de multiplier les prises de contact (courriels, réunions Zoom, etc.) afin d’avoir la sensation de « voir » à nouveau. « Cela crée une pression énorme sur chaque employé, ce qui peut être pénible à vivre. »

Pour éviter ce piège managérial, la présidente du cabinet de 40 employés de donner à chacun des objectifs « clairs et mesurables ». Car cela permet d’assurer « un suivi simple, rapide et périodique ». Elle insiste aussi sur l’importance de faire confiance. « En mode télétravail, le gestionnaire doit veiller à ce que chaque employé dispose des ressources nécessaires pour remplir la mission confiée, et lui laisser les coudées franches », dit la présidente de l’entreprise qui a parmi ses clients Loto-Québec, Énergir et VIA Rail Canada.

2. Favoriser la simplicité dans les réunions virtuelles

Selon Catherine Privé, l’ordre du jour des réunions virtuelles doit être nettement plus structuré que ne l’est celui des réunions en personne. Car il est plus difficile de rester concentré en mode virtuel, et « le moindre flottement ou temps mort » risque de faire décrocher des participants.

La priorité doit ainsi être donnée aux informations qui concernent l’organisation du travail de l’équipe (répartition des tâches, échéanciers, etc.), affirme-t-elle. Viennent ensuite les informations sur les dossiers en cours et à venir (difficultés rencontrées, état d’avancement, etc.). Et c’est tout.

3. Partager le leadership

Un bon moyen de souder une équipe dont les membres sont éloignés des autres, c’est de confier davantage de responsabilités à chacun, Catherine Privé. « En fonction de leurs compétences propres », souligne-t-elle.

Par exemple, cela peut consister à demander à une employée connue pour sa joie de vivre contagieuse d’accueillir une nouvelle recrue, en se mettant en place à sa disposition pour toute question les trois premiers mois. Ou encore, demandeur à un employé passionné de technologie de réaliser une vidéo d’entreprise qui sera diffusée sur les médias sociaux.

4. Miser sur des petites victoires

Chaque petite victoire mérite d’être méritée, à plus forte raison lorsqu’on est en télétravail, soutient Catherine Privé. Cela fait du bien à chacun de « relevé que l’équipe réussit de bons coups », en dépit des conditions de travail particulières qu’on connaît depuis le début de la pandémie.

D’où l’intérêt, selon la présidente, de fixer des étapes aisées à franchir lors de l’accomplissement d’une mission, pour chaque personne comme pour l’ensemble de l’équipe. Puis de dominante la petite victoire que représente le franchissement de chacune d’elles.

Catherine Privé le souligne, ces quatre trucs peuvent révéler d’autant plus précieux que le télétravail est là pour durer. En effet, 80 % des télétravailleurs canadiens aimeraient continuer le travail à distance, à temps partiel ou à temps plein, dans les mois à venir, selon une étude du cabinet-conseil en ressources humaines Solutions Mieux-être LifeWork dévoilée en août. Et 60 % des employeurs canadiens disent qu’à l’avenir le travail sera hybride, en partie au bureau et en partie à distance, selon ce que révèle un sondage du cabinet de gestion de la paie et des ressources humaines ADP Canada, dévoilé lui aussi en août.

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