Un peu de sport, beaucoup de science: le quotidien millimétré de Thomas Pesquet à bord de l’ISS


De retour sur un plancher mais à 400 km au-dessus de nos têtes! Thomas Pesquet est arrivé samedi en début d’après-midi sur la Station spatiale internationale, après un voyage de 23 heures. «Cela fait 20 ans que la Jaxa (agence spatiale japonaise), l’ESA (agence spatiale européenne), la Nasa et des astronautes russes n’ont pas été ensemble dans l’espace, donc c’est historique ce qui se passe aujourd «hui», at-il d’emblée souligné, lors de la traditionnelle cérémonie de bienvenue dont la principale difficulté a consisté à… faire tenir les 11 astronautes dans le cadre! En effet, le temps que l’équipe précédente ne redescende sur Terre d’ici quelques jours, il va falloir se serrer un peu dans ce «meccano» géant. Pour Pesquet et ses trois comparses, les choses sérieuses vont commencer lundi, après 48 heures d’adaptation, vivre en flottant n’étant pas aussi simple que se remettre au vélo.

Mais la grande différence entre le Thomas Pesquet d’il ya quatre ans et celui qui vient là-haut est assurément qu’il sait désormais à quoi s’attendre… et il a déjà prévenu: les six mois qui viennent, il prendre un peu plus de temps pour lui, pour se faire des souvenirs. Car les journées dans la station peuvent être intenses: jusqu’à 10 heures de travail par jour et deux heures et demie de sport pour contrebalancer les effets de la gravité sur les muscles. Sans compter l’entretien des locaux et du matériel informatique. Reste deux à trois heures pour vaquer à ses occupations, et huit heures de sommeil, si l’on s’endort facilement, pour récupérer.

Entretenir son corps… et la station

La journée commence en règle générale vers 6 heures. «Le réveil sonne. Ce n’est pas une alarme, c’est de la musique qui est envoyée depuis la Terre vers la station », précise Laura André-Boyet, instructrice d’astronautes à l’Agence spatiale européenne (ESA). «Ensuite, ils vont avoir un temps personnel pour faire leur toilette, prendre le petit-déjeuner, revoir une antisèche… Parfois, ce temps-là est amputé d’un prix de sang qu’il faut faire à jeun. »Ensuite, commencez la conférence du matin. Tous les membres d’équipage y participent. Y sont annoncés les changements de programme pour le lendemain. Les astronautes peuvent poser des questions, avant de partir à leurs postes.

VIDÉO. «Bienvenue à Crew-2»: Thomas Pesquet pénètre à bord de la Station spatiale internationale

La pause du midi est la bienvenue. «On essaie de les faire manger ensemble, mais ce n’est pas toujours simple», souligne Laura André-Boyet. Puis, c’est reparti pour le travail jusqu’à environ 19h30. Sont simplement intercalées deux séances de sport quotidiennes le matin et l’après-midi. Le soir, une nouvelle conférence, puis le dîner et enfin un temps dans son espace personnel. Là, l’astronaute peut écrire ses e-mails, parler à ses proches, regarder un film… «Mais le temps libre, c’est plutôt pendant le week-end», affirme Frank De Winne, chef du centre d’entraînement des les astronautes.

Tout le week-end? Non ! «Le samedi, il y a une demi-journée qui est consacrée au nettoyage de la station. L’autre demi-journée est consacrée à des tâches qu’on n’a pas pu faire pendant la semaine: des vidéos, des tweets, de la communication. Le dimanche, en principe, c’est une journée relax pour l’équipage. Il ya des conférences organisées avec la famille et le dimanche soir, une conférence de nouveau avec le sol pour préparer le travail du lundi », détaille Frank De Winne. L’entretien de la station n’est pas la moindre des occupations «On n’attend pas que les choses se cassent. Il y a des pièces qui sont un peu sensibles, avec une durée de vie limitée. C’est comme avec la voiture, il faut des révisions », comparez Laura André-Boyet.

«Aucune place à l’improvisation»

«Dans l’ISS, tout est programmé. C’est extrêmement dense. Il n’y a pas de place pour l’improvisation. On sait plusieurs mois à l’avance ce que l’astronaute va faire à tel moment », explique Laura André-Boyet, Pour le sport, le déchargement des véhicules ou les cent expériences qui attendent Thomas Pesquet là-haut, le temps est compté. Pour parer aux imprévus, il aura répété auparavant chacun des mois avant son départ, selon des procédures calées au millimètre. Un exemple? L’hydratation du blob, une étrange créature jaune qu’il découvre en même temps que 2000 cours d’écoles sur Terre, pendant 30 minutes à Thomas Pesquet.

Pour s’y retrouver, il pourra compter sur une interface dédiée, une frise qui se déroule sur un écran. Cliquer sur des rectangles permet de savoir combien de temps dure une activité et de connaître la procédure réservée. «Quand on est un maniaque de l’anticipation, c’est le rêve», plaisante Laura André-Boyet. Et s’il ne se souvient plus de certains détails? «La veille d’une expérience compliquée, on va mettre une petite antisèche dans son emploi du temps. »La plupart du temps, Thomas Pesquet travaillera en autonomie, mais il pourra toujours, si nécessaire, parler à un interlocuteur unique, le« CapCom »(pour Capsule Communicator), qui fait avec les équipes au sol.

La grande originalité, enfin, de ce «travail» si particulier, c’est qu’une partie des expériences étant dédiées à la physiologie des astronautes, elles se confondent parfois avec le temps du sport ou avec le temps libre. Ainsi, Thomas Pesquet fera du vélo avec un casque de réalité qui lui donne la sensation de pédaler dans les rues de Paris ou Saint-Petersbourg. Et même quand il dormira, il ne sera pas totalement tranquille puisqu’un bandeau frontal étudiera son sommeil. Pour que l’expérience ait une valeur scientifique, de futurs occupants de l’ISS doivent également la réaliser.

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