« Trop de priorités tuent les priorités ? » Les nombreuses ambitions de la France pour sa présidence de l’UE 2022 – EURACTIV.com


Alors que la France devrait assumer la présidence tournante du Conseil de l’UE en janvier 2022, la liste des questions que le gouvernement veut aborder pour l’occasion semble interminable.

« Le nombre de projets en cours et à venir auxquels nous souhaitons contribuer est le reflet de nos ambitions pour l’Europe », a déclaré l’eurodéputée Valérie Hayer (Renew) à l’issue du séminaire de travail du groupe parlementaire à Paris la semaine dernière, où elle et ses collègues parlementaires ont été reçus par Président Emmanuel Macron.

« C’est avant tout la preuve de notre plus grande volonté que les présidences précédentes », a-t-elle déclaré à EURACTIV.

« Le président a mis au cœur de son discours l’autonomie stratégique, la nécessité pour l’Union d’avoir ses propres capacités d’action et de faire agir les gens », a déclaré Hayer, soulignant que cela inclut aussi la défense, la santé, l’industrie, ainsi que la régulation des géants du numérique et « bien sûr, le green deal ».

A cela, toute une liste peut être ajoutée :

La volonté de faire avancer la directive sur le salaire minimum en Europe, rappelée par le Premier ministre Jean Castex devant les ambassadeurs de France le 31 août, la promesse de Macron de « porter une initiative forte pour une sortie accélérée des pesticides », la promotion du multilinguisme , la priorité au durcissement du contrôle des importations agricoles en provenance de l’UE 27, ou encore l’engagement du ministre de la Santé Olivier Véran à mettre le sujet des maladies rares à l’ordre du jour.

Qu’il s’agisse d’engagements réels ou d’un usage excessif du mot « priorité », le risque existe que les résultats de la présidence française de l’UE apparaissent plus pâles que le gouvernement ne le voudrait.

« Trop de priorités tuent les priorités », a déclaré Sébastien Maillard, directeur de l’Institut Jacques Delors. Néanmoins, « le premier rôle » d’une présidence tournante du Conseil de l’UE est précisément de hiérarchiser et de définir l’ordre du jour, a-t-il déclaré à EURACTIV.

« Ce qui conditionne vraiment les vraies priorités, ce sont les circonstances », a souligné Maillard, rappelant la précédente présidence française de l’UE en 2008, qui avait été consumée par la crise financière.

« Il ne faut pas oublier non plus qu’il ne s’agit pas d’achever notre grande œuvre de profonde réforme de l’Europe en six mois. Certaines de ces priorités devront conduire à la fermeture de dossiers, à des accords politiques définitifs qui ont parfois mis trop de temps à parvenir », a ajouté Hayer.

« Après le FPEU, il restera encore deux ans de mandat aux législateurs européens, ne l’oublions pas. Notre travail pour réformer l’Europe ne s’arrêtera pas après le 30 juin 2022 », a-t-elle ajouté, notant que le président Macron a profité de la réunion de la semaine dernière pour rappeler aux législateurs du groupe Renew leur « place centrale » au Parlement européen.

Un poids politique à nuancer

Maillard a également expliqué que le poids politique d’une présidence tournante est en fait assez limité puisqu’il s’agit de présider seul l’une des institutions de l’appareil européen.

« Il est évident que lorsque la présidence revient à un grand pays, un membre fondateur, c’est l’occasion de donner une impulsion que d’autres pays n’ont pas pu », a-t-il déclaré.

L’enjeu de la présidence tournante peut donc se situer ailleurs.

« Si nous avons conservé ce système après le traité de Lisbonne, ce n’est pas seulement pour faire fonctionner le Conseil des ministres à tour de rôle, mais aussi pour que chaque pays puisse se réapproprier le projet européen », a expliqué Maillard, ancien journaliste spécialisé dans les affaires européennes.

Le contexte sera toutefois particulier avec les élections présidentielles françaises qui se dérouleront au milieu du premier semestre 2022, pendant la présidence.

« En pratique, ce sera une présidence trimestrielle, pas semestrielle », précise Maillard.

Hayer de Renew était heureux à la perspective des élections de l’année prochaine.

« Cela va nous permettre de renforcer la dimension européenne du débat présidentiel », a-t-elle déclaré, expliquant qu’elle « ne peut pas imaginer une seconde que le débat échappe aux responsabilités continentales actuelles de la France lorsqu’il s’agit de tester les candidats sur leur vision de L’Europe . »

Une dernière incertitude qui pourrait ternir la présidence française de l’UE, selon Maillard, est l’issue des élections allemandes du 26 septembre, surtout si les pourparlers de formation de coalition y traînent, car Paris aura un besoin urgent d’un partenaire stable et fiable dans le Conseil en janvier.

[Edited by Zoran Radosavljevic]



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