NFT et objets virtuels comme « Metabirkin » : un défi pour les ayants droit


En reproduisant et en proposant à la vente sur la plateforme Opensea l’iconique porte-monnaie Hermès Birkin sous la forme d’un NFT intitulé « Metabirkins », l’artiste américain Mason Rothschild défie, une fois de plus, les grands principes clés du droit de la propriété intellectuelle. Ce n’est pas la première fois que l’artiste reproduit ce porte-monnaie sous forme de NFT puisqu’il en a déjà créé un nommé « Baby Birkin ». Hermès a porté le litige devant un tribunal de l’État de New York.

Les faits en cause soulèvent des questions en droit français quant à la protection des titulaires de droits antérieurs lorsque l’artiste non seulement reproduit le sac Birkin mais utilise également la marque éponyme sous des formes adaptées.

  • La réutilisation d’une création sans l’autorisation de l’auteur

La question se pose de savoir si, dans un cas similaire, la loi française sur le droit d’auteur donnerait à l’auteur d’une création les moyens légaux d’empêcher son utilisation non autorisée.

L’auteur bénéficie des droits patrimoniaux lui permettant de s’opposer à toute reproduction ou représentation non autorisée, ainsi que des droits moraux dont le droit à la paternité et le droit à l’intégrité de son œuvre. A moins qu’elle ne relève de l’une des exceptions au monopole d’auteur prévues à titre limitatif par la législation française, l’atteinte aux droits d’auteur constitue une contrefaçon passible de sanctions tant civiles que pénales.

Parmi ces exceptions, il semble que seule celle relative à la parodie, au pastiche ou à la caricature puisse être relevée dans un cas aussi semblable. Mason Rothschild a en effet souligné une intention humoristique et critique de la société de consommation dans sa démarche artistique.

Cependant, même si l’intention humoristique est conservée, cette exception exige non seulement que la seconde création soit suffisamment éloignée de la première afin d’éviter toute confusion, mais aussi que la seconde création exclut toute intention de détourner la première création. C’est sans doute là que le juge français ne suivrait pas l’argument de Mason Rothschild.

  • L’utilisation non autorisée d’une marque pour la vente du même produit mais sous forme virtuelle

A y regarder de plus près, la vente d’un produit, par exemple un porte-monnaie, sous forme de NFT ou d’objet virtuel dans un métavers pourrait-elle être assimilée à la vente du produit physique correspondant ? L’utilisation non autorisée d’une marque identique ou similaire pour désigner cet objet virtuel pourrait alors constituer une contrefaçon de marque, à condition qu’un risque de confusion dans l’esprit du public puisse être démontré.

Le risque de confusion s’apprécie en comparant les produits et/ou services désignés par la marque antérieure avec les produits et/ou services commercialisés sous le signe contesté. Les similitudes visuelles, phonétiques et conceptuelles entre les signes concernés doivent également être prises en considération.

L’usage d’une marque en relation avec des produits et/ou des services qui ne sont pas identiques ou similaires à ceux couverts par la marque antérieure, ne constitue pas une contrefaçon, sauf dans le cas d’une marque de « renommée » connue d’une partie significative de le public concerné.

Dans une situation similaire à celle de « Metabirkins », la principale question à notre avis est l’étendue de la protection à accorder à une marque désignant des « bourses ». Dans l’hypothèse où la marque ne serait pas renommée, ne faudrait-il pas considérer qu’une telle marque couvre non seulement le produit physique mais également sa version virtuelle, de sorte qu’il serait possible de s’opposer à l’usage d’un signe litigieux en relation avec le même produit mais dans un environnement virtuel ?

En l’absence d’une position claire adoptée par les offices des marques et les tribunaux, l’approche prudente impose le dépôt de nouvelles demandes pour au moins des biens virtuels téléchargeables.

Cependant et comme Mason Rothschild semble le soutenir, l’utilisation d’une technologie telle que les NFT, ne devrait pas affecter la perception de son travail. Dans la même logique, la dimension technologique d’un espace virtuel, pourrait être considérée comme n’affectant pas non plus l’application des protections déjà offertes dans le monde réel…

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