Mélenchon poursuit en diffamation le rapporteur ayant dénoncé ses comptes de la présidentielle 2017


Le leader insoumis attaquait l’interview accordée par Jean-Guy de Chalvron à BFMTV le 30 mai 2018, lors de la révélation de l’enquête judiciaire de la CNCCFP visant la campagne LFI de 2017.

L’affaire des comptes de la présidentielle 2017 de Jean-Luc Mélenchon s’est invitée vendredi au tribunal de Paris. C’était lors d’un procès en diffamation opposant le chef de la France Insoumise au rapporteur qui avait dénoncé dans les médias des « irrégularités » dans ses comptes de campagne.

Jean-Luc Mélenchon, candidat déclaré à la présidentielle 2022, attaquait en justice Jean-Guy de Chalvron, ex-rapporteur de la Commission nationale des comptes de campagne (CNCCFP), chargé de valider les dépenses électorales avant leur remboursement par les finances publiques.

« Acharnement médiatique »

Jean-Guy de Chalvron avait démissionné avec fracas de la CNCCFP le 22 novembre 2017, avant la fin de son travail sur les comptes de Jean-Luc Mélenchon, au motif que la commission lui avait demandé de modifier sa « lettre de griefs », document dans lequel le rapporteur propose 1,5 million d’euros de dépenses à rejeter.

Après son départ, la Commission avait validé les comptes du candidat LFI, retranchant 434.939 euros sur les 10,7 millions déclarés. Elle avait cependant fini par saisir la justice en mars 2018 pour des prestations possiblement surfacturées, provoquant l’ouverture d’une enquête, confiée depuis novembre 2018 aux juges d’instruction.

Pour Me Mathieu Davy, l’avocat de M. Mélenchon, « la commission a été poussée à ce signalement à cause de l’acharnement médiatique de M. de Chalvron ».

« 1500 factures douteuses »

Le chef de file de la gauche radicale attaquait l’interview accordée par Jean-Guy de Chalvron à BFMTV le 30 mai 2018, lors de la révélation de l’enquête judiciaire.

« Dans cette lettre des chagrins, je disais attention, il y a trois irrégularités: il y en a une d’ordre fiscal, il y en a un contraire à la législation sur les associations et une troisième pénale », avait déclaré l’ex- rapporteur sur le plateau télévisé.

« Il y a peut-être 1500 factures douteuses », avait-il précisé, sur environ 5000 que son co-rapporteur et lui examinateur. Comme exemples de dépenses illégitimes, voiture non sollicitée à recueillir des suffrages, le haut-fonctionnaire avait cité les déjeuners de l’équipe de campagne ou le fait de voyager pour rencontrer un chef d’État étranger.

« Ça laisse entender qu’il ya eu fraude »

À l’audience, Jean-Guy de Chalvron a reconnu que ce dernier exemple ne concernait pas Jean-Luc Mélenchon, mais que des déplacements de ce dernier à Berlin, pour rencontrer le parti Die Linke, et un autre à Genève, avait été écartés comme il évalué recommandé.

« Parler d’irrégularités, ça laisse entender qu’il ya eu fraude », « c’est une mise en cause violente du candidat », a témoigné à la barre des proches du député des Bouches-du-Rhône, le conseiller d «État Bernard Pignerol, au fait du dossier.

C’est en effet les prestations fournies à la campagne par son association, « l’Ère du peuple », que les enquêteurs judiciaires passent au peigne fin depuis bientôt trois ans. En sa qualité de président de l’association, il a été entendu le 19 février en vue d’une mise en examen de cette structure. Mais l’interrogatoire a été suspendu et doit reprendre dans les prochaines semaines, at-il expliqué au tribunal.

Dénonciation abusive

L’avocat de Jean-Guy de Chalvron, Me Pierre-Emmanuel Blard, a fait valoir que les interventions publiques de son client « ne visaient qu’à l’alerter sur les dysfonctionnements de la Commission ».

Les propositions attaquées ne visaient pas directement le candidat, qui « a en retour entrepris une longue campagne de dénigrement » de Jean-Guy de Chalvron, a ajouté l’avocat, réclamant la condamnation de Jean-Luc Mélenchon pour dénonciation abusive.

La procureure a estimé que les propositions poursuivies étaient bien diffamatoires, mais elle s’en est remise au tribunal sur la question d’une éventuelle exonération au titre de la bonne foi. La décision doit être rendue le 16 avril.

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