L’Italie gèle un superyacht avec des liens présumés avec Poutine


Rome a décidé de saisir un superyacht de 700 millions de dollars amarré dans un port toscan en attendant une décision sur l’inclusion de son bénéficiaire effectif dans le prochain train de sanctions de la Commission européenne contre la Russie.

Daniele Franco, ministre italien des Finances, a publié « un décret pour geler les avoirs dans l’attente d’une décision de l’Union européenne », a annoncé vendredi soir le gouvernement romain dans un communiqué.

Une enquête de la Guardia di Finanza, la police financière, avait révélé des preuves de « liens économiques et commerciaux importants du bénéficiaire effectif de la Scheherazade avec des éléments éminents du gouvernement russe et d’autres personnes faisant l’objet de sanctions de l’UE », poursuit-il.

Le communiqué indique que l’Italie a proposé que le bénéficiaire effectif du bateau – que le gouvernement n’a pas publiquement nommé ou identifié – soit également officiellement soumis à des sanctions de l’UE, car il ne figure pas actuellement sur la liste des sanctions.

Mais alors que l’UE débat toujours de son prochain paquet de sanctions – en particulier la question controversée de savoir s’il faut imposer un embargo sur l’achat de pétrole russe – Rome a décidé de geler le navire à titre de mesure provisoire.

La saisie fait suite à des informations parues dans les médias selon lesquelles le Scheherazade, long de 140 mètres, s’apprêtait à quitter le port de Marina di Carrara, dans le nord de la Toscane, où il faisait l’objet de réparations et d’entretien depuis des mois dans un chantier naval appartenant à l’Italian Sea Group.

Les résidents locaux ont déclaré que le réaménagement du superyacht avait été achevé cette semaine. Le navire compte six niveaux de pont, deux héliports et une piscine parmi ses caractéristiques.

Les autorités italiennes enquêtent depuis des semaines sur la propriété du superyacht dans le cadre des efforts visant à faire appliquer les sanctions de l’UE contre les oligarques liés au président russe Vladimir Poutine.

Dans le passé, l’Italie a été un terrain de jeu privilégié pour bon nombre des Russes les plus riches, reflétant les liens chaleureux entretenus par l’establishment politique et commercial italien avec Poutine et son entourage.

Mais le Premier ministre Mario Draghi a été véhément dans ses dénonciations de l’invasion de l’Ukraine, que le dirigeant italien a décrite comme une attaque contre l’ordre multilatéral de l’après-Seconde Guerre mondiale.

Les autorités italiennes ont appliqué les sanctions punitives de l’UE avec énergie, gelant plus d’un milliard d’euros de superyachts et de villas en bord de mer liés à des oligarques considérés comme proches de Poutine, tels qu’Alexei Mordashov, Petr Aven et Alisher Usmanov.

Mais le Scheherazade avait attiré une attention particulière, car les associés du militant anti-corruption russe emprisonné Alexei Navalny ont soutenu que le superyacht était probablement celui de Poutine.

Comme preuve de ses liens avec le président russe, les militants de la Fondation anti-corruption ont pointé une liste d’équipage, suggérant que plusieurs membres de l’équipage du navire étaient membres du Service fédéral de protection russe, qui est responsable de la sécurité de Poutine.

Selon des documents consultés par le FT, le propriétaire nominal de Scheherazade est Beilor Asset Limited, une société basée aux Îles Marshall.

Selon deux personnes informées des discussions à Rome et à Bruxelles, l’Italie a demandé jeudi l’ajout du bénéficiaire effectif présumé du navire à la liste des sanctions de l’UE.

Selon deux responsables informés par l’enquête italienne, la police financière a d’abord lié le superyacht à l’individu en mars. Début avril, les enquêteurs ont demandé au comité de sécurité financière du ministère des Finances d’exiger que l’individu soit inclus dans les sanctions.

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