L’Iran accélère la mise en place d’un intranet national


Un Iranien consulte son téléphone sur un pont équipé d'une antenne 5G, dans le parc Ab-o-Atash dans le nord de Téhéran, le 16 février 2021.

Le spectre d’un Internet coupé du monde, avec la mise en place du réseau national de l’information (RNI), hante les internautes iraniens à l’approche de la présidentielle, le 18 juin. Des analystes estiment qu’en cas de manifestations pendant la campagne électorale ou à l’annonce des résultats les autorités de Téhéran sont en mesure de couper l’accès à la Toile pour les utilisateurs iraniens (au moins 71% des 83 millions d ‘ habitants), sans que la vie quotidienne en soit affectée. Ces craintes sont dues plus vives que le Guide suprême, Ali Khamenei, a appelé à plus de contrôle de la Toile. «Nous sommes fiers de laisser l’espace virtuel [sans surveillance]. Nous avons un délit. Cet outil ne doit pas être mis à la disposition de l’ennemi », at-il déclaré, le 20 mars, dans un discours à l’occasion du Nouvel An iranien.

«Du pain bénit» pour le régime

La mise en place du projet du RNI, lancé en 2012, a été accélérée ces dernières années, avec la conception d’applications, moteurs de recherche, messageries et sites Internet iraniens, pour la plupart des copiés sur des modèles étrangers. Les sites Internet iraniens hébergés à l’étranger ont été contraints de se relocaliser dans le pays. Toutes les données sont enregistrées sur des serveurs en Iran, ce qui permet aux autorités d’avoir un accès total, si besoin, au péril de la sécurité des internautes dans un pays où toute personne peut être poursuivie et condamnée à de longues peines de prison pour ses activités sur la toile.

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Les sanctions américaines, imposées durant la présidence de Donald Trump (2017-2021), ont facilité la tâche des autorités iraniennes pour promouvoir leur projet d’intranet. Depuis 2017, de nombreux services fournis par des sociétés américaines comme Amazon, Google et Microsoft sont indisponibles pour les internautes iraniens. Et les Iraniens n’ont pas la possibilité de procéder à des transactions à l’international, les banques étrangères refusent d’accepter leurs paiements, de crainte d’être épinglées par Washington. «Dans ce contexte, il est normal que les Iraniens se tournent vers les services offerts par Téhéran, se désole Amir Rashidi, un chercheur iranien spécialisé en sécurité informatique et droits numériques qui vit aux Etats-Unis. La politique de «pression maximale» menée par Trump a poussé les Iraniens dans les bras du régime. C’est du pain bénit pour lui! »

Déjà, sous le mandat de l’ultraconservateur Mahmoud Ahmadinejad (2005-2013), la censure d’Internet s’exerçait contre des réseaux sociaux comme YouTube, Twitter et Facebook, les sites à caractère politique et ceux contenant des mots bannis ayant trait notamment à la sexualité. Mais, cette censure pourrait être contournée par l’utilisation de logiciels tels que les réseaux privés virtuels (VPN) et les proxys. D’où les efforts déployés depuis pour mettre en place un Internet national – intranet – dont l’efficacité a d’ores et déjà été testée à cinq reprises depuis 2018, lorsque l’Iran avait coupé pour la première fois l’accès à l «Internet mondial.

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