Le vin de la zone inondable d’Allemagne donne de l’espoir pour l’avenir


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Bad Neuenahr-Ahrweiler (Allemagne) (AFP)

Dans la vallée de l’Ahr, les bouteilles tachées de boue récupérées dans des caves inondées représentent l’espoir d’un nouveau départ après la catastrophe meurtrière qui a frappé l’Allemagne il y a trois semaines.

« Je me suis dit qu’on ne pouvait pas tout jeter », se souvient Linda Kleber, la fondatrice de l’initiative « Flutwein » (« Flood wine »).

Kleber a eu l’idée alors qu’elle récupérait bouteille après bouteille dans le magasin de son restaurant ravagé par les inondations.

Les millésimes qui ont pu être sauvés sont désormais proposés à la livraison dans l’état où ils ont été trouvés : recouverts de limon, singulier souvenir des ravages causés par les inondations.

L’argent récolté, plus de deux millions d’euros à ce jour, est « une source d’espoir pour tous les vignerons et aussi pour le secteur de l’hôtellerie », explique Peter Kriechel, 38 ans, lui-même vigneron et président de l’association des viticulteurs professionnels locaux.

Dans sa cave, environ 200 000 bouteilles de vin ont été immergées dans la nuit du 14 juin.

« Je pense que nous sommes au début d’un long marathon », dit-il. « Une initiative comme ‘Flutwein’ pourrait nous donner un coup de fouet. »

– ‘Un tsunami’ –

Dans la vallée de l’Ahr, connue pour le pinot noir qui pousse sur ses pentes abruptes, l’économie repose fortement sur la viticulture et le tourisme qu’elle génère.

« Sans vin, la vallée de l’Ahr n’existerait pas, sans parler de sa gastronomie », déclare Joerg Kleber, mari de Linda.

Au total, la catastrophe du mois dernier a coûté la vie à 225 personnes à travers l’Europe, dont 187 en Allemagne, et détruit 5 à 10 % des vins d’Ahr.

Mais les dommages causés aux machines et aux caves ont été beaucoup plus importants, de nombreuses exploitations étant gravement touchées ou presque entièrement détruites.

Paul Schumacher, 63 ans, fait partie de ceux dont les pertes ont été importantes.

Dans la vallée de l'Ahr, connue pour le pinot noir qui pousse sur ses pentes abruptes, l'économie repose fortement sur la viticulture et le tourisme qu'elle génère
Dans la vallée de l’Ahr, connue pour le pinot noir qui pousse sur ses pentes abruptes, l’économie repose fortement sur la viticulture et le tourisme qu’elle génère Bernd Lauter AFP/Fichier

« Ce n’était pas seulement une inondation mais un tsunami », explique le producteur.

Juste avant que les eaux n’arrivent à sa porte, Schumacher est descendu pour s’assurer que ses tonneaux de vin étaient bien scellés.

Lui et sa femme se sont alors réfugiés à l’étage, mais « l’eau est très vite montée d’un mètre au-dessus du premier étage », raconte-t-il, toujours visiblement affecté par ce qui s’est passé. Au final, le couple a fini par passer une partie de la nuit sur le toit.

Un dixième de ses cinq hectares de terres a été dévasté. Le rez-de-chaussée de sa maison, où il avait également un restaurant, est encore entièrement recouvert de boue.

Cependant, le vétéran espère toujours récolter ses raisins et produire le millésime de cette année. La production de vin dans la région d’Ahrweiler reste très incertaine, mais les producteurs voisins ont proposé d’intervenir pour aider à rentrer la récolte de cette année.

– ‘Beaucoup partiront’ –

Face à l’une des plus grandes catastrophes naturelles que l’Allemagne ait connues au cours des dernières décennies, le gouvernement d’Angela Merkel a déjà signé une aide d’urgence de plusieurs centaines de millions d’euros pour aller aux plus nécessiteux.

L’aide sera complétée par un projet de reconstruction, d’un coût supplémentaire de plusieurs milliards.

Les habitants pensent néanmoins que la vallée ne sera plus jamais la même. « Beaucoup partiront et ne reconstruiront pas leurs maisons », déclare le producteur de vin Schumacher.

La production de vin dans la région d'Ahrweiler reste très incertaine
La production de vin dans la région d’Ahrweiler reste très incertaine Bernd Lauter AFP/Fichier

C’est une option à laquelle la famille Kleber n’a pas pensé un instant, même si leur restaurant du centre d’Ahrweiler ne rouvrira pas au même endroit.

La cuisine, le bar, la salle à manger et le jardin du ‘Kleber’s’ ont plus ou moins disparu après une opération de nettoyage de deux semaines. Il n’en reste que les murs peints à la boue jusqu’à la laisse des hautes eaux.

« Les choses recommençaient à repartir » après des mois d’arrêt forcé en raison de la pandémie, déplore Joerg Kleber, chef de profession.

Mais le coronavirus n’était « rien » comparé aux forces qui se sont abattues sur Ahrweiler en l’espace de quelques heures la nuit des inondations, dit-il.

Il y aura un nouveau ‘Kleber’s’ à proximité, promet le cuisinier.

« Nos amis et notre vie sont ici », dit-il. « Après cette catastrophe, nos racines ici pourraient même être plus fortes qu’elles ne l’étaient auparavant. »

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