Le « palais des asperges » de Vienne cache les tensions nucléaires iraniennes


Publié le: Modifié:

Vienne (AFP) – Le calme à l’extérieur de l’hôtel de luxe Palais Coburg de Vienne jeudi a démenti les pourparlers diplomatiques tendus sur le programme nucléaire iranien qui se sont déroulés à l’intérieur.

Mis à part quelques caméras de télévision surveillant les émissaires arrivant dans les saloons noirs, rien n’indique que les négociations pour relancer l’accord de 2015 pourraient aboutir à une percée ou échouer dans les prochains jours.

Le bâtiment, construit par le prince Ferdinand de Saxe-Cobourg et Gotha en 1845 sur un ancien bastion de l’enceinte de la ville, fut bientôt surnommé le « Palais des asperges » par les habitants de la capitale autrichienne en raison de ses colonnes élancées.

Derrière la façade ornée, les réunions se sont souvent prolongées en soirée, y compris le week-end.

Le refus de la délégation iranienne de s’asseoir autour de la même table que les États-Unis signifie que l’UE Enrique Mora, qui coordonne les pourparlers, fait constamment la navette entre les deux.

Les autres parties à l’accord sont également présentes à Coburg – où l’accord a été initialement conclu – : la Grande-Bretagne, la Chine, la France, l’Allemagne et la Russie.

L’accord de 2015 a assoupli certaines sanctions contre l’Iran en échange de restrictions strictes du programme nucléaire de Téhéran.

Cependant, il a commencé à s’effondrer après le retrait de l’ancien président américain Donald Trump en 2018 et la réimposition de sanctions.

Son successeur Joe Biden a pris ses fonctions en 2021 en déclarant vouloir relancer l’accord et les négociations ont commencé en avril dernier.

‘On ne vit qu’une fois’

Pour Vienne, dont les secteurs très importants du tourisme et des conférences ont été décimés par la pandémie, les pourparlers ont été une bouée de sauvetage bienvenue alors que la ville reprend son rôle historique de lieu de négociations internationales.

La délégation américaine est briefée à l’hôtel cinq étoiles Imperial – qui a accueilli chefs d’Etat et célébrités au fil des décennies – ou à quelques centaines de mètres du Coburg, à l’hôtel Marriott.

La délégation iranienne, hébergée de l’autre côté du Stadtpark de Vienne, compte pas moins de 40 personnes, contre moins de 10 pour la France.

Les diplomates ont été tenus à l’écart de la presse.

Les quelque 200 reporters accrédités d’une trentaine de pays se rassemblent sous une grande tente blanche sur la place devant l’hôtel, offrant un abri contre l’hiver viennois.

Les protestations bruyantes des opposants au régime iranien ont animé l’atmosphère. A quelques pas de la tente de la presse, ils ont exposé une série d’images de prisonniers occidentaux en Iran.

Les négociations ont même attiré des militants qui ont entamé une grève de la faim pour exiger la libération des détenus – un rappel des tensions non résolues même si les pourparlers sur le nucléaire réussissent.

A l’intérieur, les négociateurs ne risquent que de côtoyer ceux qui ont craqué sur une suite.

Le slogan au-dessus de la liste de prix de l’hôtel – presque tous à quatre chiffres – se lit comme suit : « Vous ne vivez qu’une fois ».

« Point d’inflexion sensible »

Les rares commentaires publics des négociateurs proviennent généralement de l’ambassadeur chinois au nœud papillon Wang Qun, qui s’arrête parfois pour s’adresser à la presse, ou du Russe Mikhail Ulyanov, qui partage souvent ses opinions – majoritairement optimistes – sur Twitter.

Mais la discrétion est le mot d’ordre pour des discussions aussi sensibles.

Les négociateurs « sont à un point d’inflexion sensible et c’est pourquoi ils gardent leurs cartes contre leur poitrine », selon Ali Vaez, spécialiste de l’Iran à l’International Crisis Group.

« Les principales discussions se déroulent toujours à Vienne, pas dans les capitales », a-t-il ajouté.

Laisser un commentaire