La beauté « durable », nouveau passage obligé pour les cosmétiques?


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AFP

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15 mars 2021

Shampoings solides « zéro déchet », emballages recyclables, ingrédients naturels issus de filières durables: l’industrie cosmétique recherche de plus en plus la croissance dans les thèmes de l’environnement ou de la santé.

Des faits main pour la marque Route Mandarine, photographiés le 7 juin 2018 dans une boutique de Porspoder (Finistère). – AFP / Archives

Le discours sur la durabilité n’émane plus seulement de petites marques traditionnelles. L’Oréal vient ainsi de rappeler son objectif de « 95% d’ingrédients bio-sourcés, issus de minéraux abondants ou de procédés circulaires » d’ici 2030. Le mastodonte français, dont les ventes avoisinaient les 28 milliards d’euros l ‘an dernier, a aussi lancé il y a deux ans et un site pour répondre aux questions du public sur les ingrédients utilisés.

Le géant américain Coty intègre également des critères environnementaux et sociétaux dans le développement de ses nouveaux produits. Dernière annonce en date, un partenariat avec LanzaTech, spécialisée dans la production d’éthanol à partir de gaz résiduels recyclés.

Le suisse Givaudan, numéro un mondial des parfums et arômes, a lui lancé, lundi, un outil pour les parfums afin d’économiser les ingrédients et les formules du point de vue de la biodégradabilité ou du caractère renouvelable.

La plus petite marque bretonne spécialisée dans les produits d’entretien Briochin (35 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel) a, elle, démarré en 2016 une gamme de cosmétiques 100% labellisés bio.

Shampoings solides, « pains » de toilette à usages multiples, elle propose « des formules simples pour plusieurs usages, avec moins de produits mais qui s’adressent à toute la famille », souligne Caroline Cantin, directrice générale adjointe.

« Facteur clé » pour certains consommateurs

Les produits bio et naturels certifiés représentent encore une partie infime des ventes de cosmétiques en France: seulement 6,4%, soit 970 millions d’euros en 2020 sur un marché estimé à près de 16 milliards d’euros, selon le cabinet Xerfi.

Mais à l’heure où la demande en produits de beauté sur les marchés mûrit stagne, « le bio est l’un des segments qui produisent le plus de croissance en valeur absolue », affirme Benoît Samarcq, chargé d’études économiques chez Xerfi, évoquant 8% l’an dernier.

Les forums beauté regorgent de témoignages de consommatrices comme Nina, qui raconte sur Beauté Test être « tombée sur un reportage (…) qui parlait des ingrédients nocifs présents dans les cosmétiques. Cela m’a fait réfléchir, étant en essai bébé je me dis que c’est peut-être le moment de faire plus attention « .

Des applications prisées des consommateurs telles que Yuka se font aussi fort d’éplucher les listes d’ingrédients des cosmétiques à la recherche de produits potentiellement nocifs, et contribuent à modifier les habitudes.

«Avant même la pandémie, on a vu les préoccupations sur la santé monter en puissance», observe Hervé Navellou, directeur général de L’Oréal France. «Les consommateurs, en particulier la génération Z et les millennials, l’intérêt déjà la durabilité comme un facteur clé dans leurs décisions d’achat», explique aussi, dans un courriel à l’AFF, Thierry Molière, responsable de la recherche chez Coty.

Quel engagement?

Face à cette « vraie tendance de fond », l’industrie est obligée de s’adapter, selon Mathilde Lion, experte beauté pour le cabinet NPD Group: « Il y a dix ans, ce sont les marques qui diffusent leur message. Maintenant, les consommateurs ont pris le pouvoir, ont ces attentes.

A minima, les grands acteurs « doivent avoir des initiatives en faveur de l’environnement ou en faveur de davantage de transparence », abonde Benoît Samarcq. Reste à voir quel est l’engagement réel derrière les discours marketing.

« Ce n’est pas parce qu’une entreprise achète une marque bio ou utilise du plastique biosourcé que cela suffit », avertit ainsi Romain Ruth, président de l’association Cosmébio, un label de cosmétiques bio qui regroupe plus de 450 entreprises du secteur en France. « Il faut chercher le label, que ce soit un engagement juridique et scientifique. »

Cela peut aussi permettre de voir plus clair dans la multitude des étiquettes vantant la naturalité: des labels comme par exemple Cosmébio, Natrue ou encore Ecocert vont « plus loin que la norme ISO 16128 relative aux cosmétiques bio, publiée en 2017 », remarque Benoît Samarcq.

Selon cette norme, accusée par ses détracteurs de favoriser le « greenwashing », un ingrédient est considéré comme dérivé naturel dès qu’il contient plus de 50% de matières naturelles. Le reste pouvant alors être issu de l’industrie pétrochimique.

« Ce qui n’est évidemment pas le cas pour les étiquettes et peut porter à confusion auprès des consommateurs », reconnaît M. Samarcq.

Par Marie-Morgane LE MOEL, à Paris, 15 mars 2021 (AFP)

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