Des scientifiques fustigent l’UE sur l’étiquette énergétique « verte » du gaz et du nucléaire


Une proposition de l’UE visant à étiqueter l’énergie nucléaire et une partie du gaz naturel comme sources d’énergie verte a été critiquée par des experts engagés par Bruxelles pour aider à élaborer les règles d’investissement durable.

Le groupe de scientifiques souhaite que Bruxelles modifie sa soi-disant «taxonomie sur la finance durable» pour limiter l’utilisation du gaz et de l’énergie nucléaire ou risquer de saper les objectifs climatiques de l’UE.

Les écologistes et certains États membres ont déjà critiqué l’UE sur le projet de plan, qui permettra à l’énergie nucléaire et à certaines formes de gaz naturel d’être considérées comme durables pendant des décennies. La désignation fait partie des règles conçues pour guider les investissements dans les activités vertes.

Dans un document consulté par le Financial Times, le groupe d’experts qui a aidé à concevoir la taxonomie au cours des trois dernières années souhaite que Bruxelles refuse une étiquette verte à l’électricité produite à partir de gaz naturel qui produit plus de 100 grammes de CO2 par kilowattheure. Cela est à comparer avec plus de 550 kg/kWh par an sur 20 ans autorisés dans le projet. Le gaz naturel a une empreinte carbone inférieure à celle du charbon mais produit toujours du CO2. Il peut bénéficier du label vert s’il est utilisé pour remplacer le charbon.

Cette position exercera une pression sur Bruxelles pour qu’elle modifie la taxonomie face à une réaction scientifique et politique. Les commentaires seront envoyés à la Commission européenne vendredi dans le cadre d’une consultation entre Bruxelles, les États membres et des experts sur les règles. Le texte devrait être finalisé ce mois-ci.

L’énergie nucléaire et certaines formes de gaz naturel ont été incluses dans le projet de taxonomie à la fin de l’année dernière après que Bruxelles a été soumise à de fortes pressions de la part de certains gouvernements de l’UE qui voulaient éviter que les principales sources d’énergie ne soient pénalisées. Ils comprenaient la France, parmi les pays les plus pro-nucléaires d’Europe, et les États dépendants du gaz en Europe de l’Est.

Dans le projet de la commission, l’énergie nucléaire, qui n’a pas d’empreinte carbone mais produit des déchets toxiques avec des risques d’irradiation, est considérée comme durable tant que les pays peuvent prouver qu’ils peuvent éliminer les déchets en toute sécurité. De nouveaux permis nucléaires peuvent être accordés jusqu’en 2045.

Les experts affirment que l’inclusion de l’énergie nucléaire contrevient au principe de « ne pas causer de dommages significatifs », qui est essentiel pour garantir l’éligibilité au label vert. Le document demande des « changements substantiels » au texte afin de s’assurer que les nouvelles centrales nucléaires contribuent aux objectifs climatiques de l’UE.

Les experts ajoutent que dans sa forme actuelle, la taxonomie ne serait « pas adaptée » pour aider à classer les produits de finance durable.

La critique scientifique enhardira les pays anti-nucléaires comme l’Autriche et le Luxembourg qui se sont engagés à poursuivre la commission devant la Cour européenne de justice si la taxonomie est approuvée dans sa forme actuelle.

Malgré les critiques virulentes de certains coins, le projet est presque certain d’être approuvé car il nécessite une super majorité d’États membres et de députés pour le rejeter. Les législateurs de l’UE ne peuvent pas proposer leurs propres amendements.

La France, la plus grande puissance nucléaire d’Europe, a contribué à exiger que la technologie nucléaire reçoive le label durable. Le président français Emmanuel Macron a déclaré mercredi que l’inclusion du nucléaire « était conforme à la protection contre le changement climatique ».

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