Ce n’est pas le moment pour la Grande-Bretagne d’augmenter les impôts


Le parti conservateur britannique au pouvoir est confronté à un trilemme. Il souhaite être le parti des finances publiques saines mais veut aussi éviter d’augmenter les impôts. Le Premier ministre Boris Johnson a également exclu les coupes dans les services publics et s’est engagé à ne pas «revenir à l’austérité d’il y a 10 ans». Le parti, cependant, ne peut pas avoir toutes ces choses à la fois.

Les rumeurs d’augmentation des impôts avant le budget de printemps doivent être comprises dans ce contexte: le chancelier, Rishi Sunak, souhaite rappeler à son parti et à un Premier ministre ayant une tendance à plaire aux gens de ce fait gênant. Les augmentations potentielles flottantes de l’impôt sur les sociétés nous rappellent que, à terme, une décision doit être prise sur laquelle deux, sur trois, les conservateurs peuvent vivre.

Il n’est cependant pas nécessaire de résoudre ce trilemme lors du prochain budget, prévu pour mars. Premièrement, le Parti conservateur n’a pas encore décidé ce que signifie réellement son engagement à «des finances publiques saines» à une époque de taux d’intérêt bas; l’emprunt pourrait être à un niveau record, mais les coûts du service de la dette continuent de baisser. Il n’y a pas encore de cadre budgétaire post-coronavirus, ni d’objectifs sur lesquels fonder la politique fiscale et de dépenses. On ne sait pas non plus dans quelle mesure les dommages causés à la capacité économique sont permanents, ni avec quelle facilité l’économie va rebondir.

Plus fondamentalement, la Grande-Bretagne a désormais besoin du soutien du gouvernement plutôt que d’un assainissement budgétaire. Même sur les hypothèses les plus optimistes sur la livraison des vaccins et l’efficacité des mesures de verrouillage, l’économie fonctionnera toujours sous de sévères restrictions lorsque le chancelier fera sa déclaration. Une orientation budgétaire expansionniste est essentielle pour compenser l’impact de contraction sur le secteur privé des restrictions relatives aux coronavirus. Le plus gros risque, même pour les finances publiques, reste trop peu. La priorité doit être d’éviter les cicatrices qui appauvrissent durablement le pays.

Le Royaume-Uni serait la seule grande économie à vouloir maîtriser les dépenses publiques – ce qui donnerait peu de confiance aux investisseurs dans son approche. Lors de son audience de confirmation au Sénat, la nouvelle secrétaire au Trésor américain Janet Yellen a déclaré que «la chose la plus intelligente que nous puissions faire est d’agir en grand». Des organisations internationales telles que l’OCDE ont déclaré que les dépenses devraient être maintenues.

À plus long terme, le Royaume-Uni devra apporter des changements. Le coronavirus ne fera qu’appauvrir le pays, tout comme le Brexit. S’il souhaite maintenir le même niveau de services publics dans une société vieillissante, il lui faudra des impôts un peu plus élevés. C’est la dure vérité à laquelle est confronté le Parti conservateur. Le fait de déguiser des coupes symboliques du budget de l’aide étrangère, un gel des salaires du secteur public ou une légère augmentation de l’impôt sur les sociétés comme des «choix difficiles» n’est pas une réponse durable à ce défi.

Les conservateurs sont entravés par leur engagement manifeste de ne relever aucun des trois principaux taux d’imposition: l’assurance nationale, l’impôt sur le revenu et la taxe sur la valeur ajoutée. Cette promesse a toutefois été faite avant la pandémie de coronavirus. Rares sont ceux qui reprocheraient au gouvernement de s’être adapté aux nouvelles circonstances. De nombreux contribuables fortunés, sachant qu’ils ont été isolés des pires effets de la pandémie et ont même économisé de l’argent, ne s’opposeraient pas à ce qu’on leur demande de contribuer un peu plus.

En fin de compte, cependant, une vision plus large de la fiscalité s’impose. Le bricolage des chanceliers successifs a réduit l’assiette fiscale, en partie par la prolifération de nombreux «allégements fiscaux». Celles-ci, ainsi que d’autres distorsions, devraient être réexaminées. Pour l’instant, cependant, le choix difficile des conservateurs peut être reporté à un autre jour.

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