Énormes pressions de corruption auxquelles sont confrontés les urbanistes africains : quelques réponses


La corruption est généralement définie comme l’abus d’un pouvoir confié à des fins personnelles.

Comprendre et lutter contre la corruption à l’échelle de la ville est crucial car les villes abritent de plus en plus une grande partie de la population mondiale. Selon les Nations Unies, plus des deux tiers de la population mondiale vivront dans des villes d’ici 2050. La croissance urbaine la plus rapide se produit en Afrique et en Asie.

Dans notre projet Cities of Integrity, nous avons travaillé avec des urbanistes et leurs organismes professionnels respectifs en Afrique du Sud et en Zambie. L’objectif était de comprendre comment ils vivent et gèrent la corruption dans leur pratique quotidienne. Nous avons également cherché à imaginer des moyens créatifs par lesquels leur communauté professionnelle pourrait jouer un rôle dans le renforcement de la transparence et de la responsabilité collective.

Comme nous l’expliquons dans cette vidéo animée, la corruption dans le développement urbain peut conduire à des infrastructures dysfonctionnelles qui ne répondent pas aux besoins publics. Il ancre également l’injustice dans les systèmes urbains pendant des décennies.

L’immobilier urbain vaut plus que la valeur combinée des actions, des obligations et des actions dans le monde et – en particulier en période de volatilité économique – est une classe d’actifs en vogue. L’immense fortune que l’on peut tirer des terres urbaines et de l’immobilier attire également des personnages peu recommandables désireux de contourner les règles.

Dans ce contexte complexe, les urbanistes tentent de maintenir l’équilibre entre les besoins publics et les intérêts privés. Cela les rend particulièrement vulnérables aux influences corrompues. C’est parce qu’ils allouent des droits de développement – ​​par le biais du zonage, par exemple. Ils décident également de l’emplacement des infrastructures publiques clés telles que les routes ou les écoles. De telles décisions ont un impact important sur la valeur des terres et le prix de la propriété. Ils peuvent générer d’importants bénéfices exceptionnels.

Sous pression

Dans notre enquête en ligne, près de la moitié (46 %) des 113 planificateurs sud-africains ont déclaré qu’on leur avait demandé au moins une fois d’ignorer ou de violer une règle, une politique ou une procédure de planification pour obtenir un résultat particulier.

Une proportion similaire – 43 % – a indiqué que des collègues, des supérieurs ou des hauts fonctionnaires avaient un intérêt personnel à planifier les activités qu’ils supervisaient, au moins à l’occasion.

Parmi nos 98 répondants zambiens, ces chiffres étaient encore plus élevés. 73% avaient été invités à favoriser un parti en particulier dans leur prise de décision.

Dans les deux pays, les planificateurs ont signalé l’ingérence politique comme un obstacle majeur au maintien de l’intégrité professionnelle. Il s’agissait d’une plainte plus courante pour les planificateurs zambiens.

Pour leurs homologues sud-africains, la plus grande préoccupation était le manque de capacité et d’efficacité de l’administration locale. Comme l’a déploré un répondant :

Les politiciens ne comprennent pas la surveillance. Il y a une ligne très mince entre la surveillance et l’ingérence, et ils ne peuvent pas faire la différence entre les deux.

Favoriser l’intégrité professionnelle

Dans les deux pays, la majorité des planificateurs pensaient également que la terre était fréquemment accaparée par de puissants groupes d’intérêts en toute impunité. Ainsi, seulement 15 % des planificateurs sud-africains pensaient que le grand public ou les groupes les plus pauvres de la société bénéficiaient le plus du développement urbain. Ici, nos conclusions correspondent également aux chiffres récents du réseau de recherche panafricain indépendant Afrobarometer.

Il a révélé que 67% du grand public en Afrique du Sud pensaient que les riches étaient très susceptibles de s’en tirer en soudoyant des fonctionnaires pour qu’ils enregistrent faussement des terres qui ne leur appartiennent pas.

Enfin, les planificateurs sud-africains et zambiens ont fait preuve d’un faible niveau de confiance dans l’efficacité des mesures anti-corruption actuelles axées sur la conformité. Un sentiment répandu était que certains codes de planification étaient « coupés de la réalité ». Ils pensaient également qu’aucune procédure ne pouvait compenser un manque de principe éthique. Comme Crispian Olver, auteur acclamé en matière d’affaires publiques et ancien fonctionnaire municipal, l’a noté avec justesse dans l’une de nos tables rondes publiques :

Un système transparent, dirigé par des personnes sans intégrité, est tout aussi corrompu.

Néanmoins, la majorité des planificateurs sud-africains et zambiens ressentaient toujours un fort sentiment d’utilité publique dans leur travail. Ici, nos données corroborent l’idée défendue par les spécialistes des affaires publiques Wendy Hayes et Beth Gazley selon laquelle les réseaux professionnels peuvent aider à appliquer des systèmes de valeurs positives et ainsi aider à lutter de manière proactive contre la corruption.

Dans les deux pays, les répondants considèrent les cours de formation professionnelle sur l’éthique et l’intégrité comme des mesures prioritaires à prendre par leurs associations professionnelles respectives. Cependant, comme le montrent nos recherches, pour que de telles initiatives ne deviennent pas des « exercices à cocher », il est important de comprendre d’abord le contexte de planification locale et ses pressions de corruption spécifiques, avant d’élaborer des tactiques et des outils appropriés pour renforcer l’intégrité professionnelle.

Responsabilité collective

Bien que nos recherches suggèrent que l’intégrité professionnelle a un rôle important à jouer dans la lutte contre la corruption urbaine, nous reconnaissons également que les changements de comportement individuels ne suffisent pas à eux seuls à relever les défis de la corruption urbaine sur le continent. Des réformes juridiques des lois de planification obsolètes, des réformes de la fonction publique et une plus grande transparence dans les processus de passation des marchés seront également nécessaires.

Néanmoins, nous soutenons que les réseaux professionnels peuvent jouer un rôle clé dans le renforcement de la responsabilité collective des urbanistes et les aider à devenir des champions de l’intégrité urbaine.La conversation

Laura Nkula-Wenz, enseignante et chercheuse au Centre Africain des Villes, Université du Cap

Cet article est republié de The Conversation sous une licence Creative Commons. Lire l’article d’origine.

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