Vincent Orsida (CS Boucherville) « Le soccer est le sport le plus pratiqué au Canada »


Parti en 2016 vivre une expérience sportive Outre-Atlantique, le Grassois au long parcours sur la Côte d’Azur, Vincent Orsida raconte à Actufoot son expérience et dévoile ses ambitions dans les années à venir, dans un pays où le soccer prend une place prépondérante dans l’activité sportive des Canadiens.

Vincent, pour commencer, parlez-nous de votre parcours.

Mon parcours d’entraîneur commence à Mouans-Sartoux. À 19 ans pendant que je jouais avec les séniors, on m’a proposé un poste dans la coordination et du coup un contrat, je suis alors devenu salarié. Je suis ensuite passé responsable de catégorie, et entraîneur général par besoin. Au bout de 3 ans, sur un eu des problèmes financiers, je suis partie au Cavigal en U19 DH. En même temps, j’avais passé mon Brevet d’État. Après seulement une saison, j’ai quitté le Cavi ‘pour Saint-Jean Beaulieu en tant que responsable du foot animation. Encore deux ans à la JSSJB et je suis retourné aux sources à Mouans-Sartoux dans le staff de l’équipe première. Belle expérience qui se termine encore par un départ dans mon club de coeur, le RC Grasse, où j’avais en équipe principale U19 DHR. Ensuite, on m’a proposé une place d’adjoint avec l’équipe fanion de la fusion entre les deux clubs de Cagnes. Et encore un an après, j’ai intégré la société MyCoach. Après ça, je suis à nouveau retourné à Mouans-Sartoux pour faire une troisième pige, puis encore un retour au Cavigal. En réalité, j’ai saisi toutes les opportunités qui me intéressantes. Entre-temps, j’étais parti au Québec pour m’y apparaitre et découvrir le pays. J’avais déjà des idées de départ et des envies de m’expatrier. Et depuis maintenant 5 ans, je suis au Québec et je travaille actuellement pour le Club de Soccer de Boucherville.

Comment est venue cette envie de départ?

Comme j’ai dit, j’avais vraiment fait le tour sur la Côte d’Azur avec énormément d’expériences très intéressantes. Avant de partir, j’étais sur le point de m’engager avec un club de N3 en Lozère, mais au moment de signer mon contrat, les dirigeants ont démissionné du coup, je n’ai pas pu prendre part au projet et ça m ‘un déçu. Dans cette situation, je suis parti à Sherbrooke avant de rejoindre Boucherville. Je me suis dit que le pied est en plein développement et j’ai adoré la qualité de vie. J’avais envie d’un nouveau défi et il s’est présenté à moi. Je l’ai saisi et j’en suis ravi. Par contre, les plus gros freins, ce sont l’adaptation et les températures. Il faut aussi aimer les déplacements. Pour aller jouer un match, on fait parfois 12 heures de route. Pour aller au travail, aussi, je me tape 1h30 aller et retour.

«Quand on fait une réunion d’éducateurs, c’est dans un amphithéâtre. »

À quoi ressemble une journée type en tant que directeur sportif d’un club au Canada?

Honnêtement, c’est un poste où l’on gère tous les aspects. Les finances, la gestion marketing et sponsoring, toute la partie technique et j’ai aussi en charge l’équipe première du club. Mais aussi le sport-étude avec l’Université de Sherbrooke. Et là-bas, c’est vraiment la «structuration à l’américaine», la vie est un peu comme dans les films. J’en ai vu toutes les facettes et c’est énorme. Dans mon premier club, j’avais 450 équipes à gérer. Quand on fait une réunion d’éducateurs, c’est dans un amphithéâtre (rires). Pour donner un exemple, aujourd’hui, j’ai 10 assistants à temps partiel et il y a plus de 4 600 licenciés dans le club de Boucherville.

Comment jugez-vous le niveau global?

Franchement, il est très intéressant. Là-bas, le joueur est une sorte de prototype. Très technique avec l’athlétique à l’américaine. Il y a de supers joueurs et j’ai été champion provincial avec les U17 à Sherbrooke. Sur un atteint le championnat national et était vice-champion. Deux de mes joueurs ont signé à l’Impact Montréal, d’autres en Europe. Globalement, le niveau est bon et tend à s’améliorer encore plus dans les années à venir. Après au niveau de mon équipe première, le niveau s’apparenterait à la R1, voire N3 pour les meilleures équipes. Actuellement, sur aimerait intégrer la PLSQ, la ligue semi-professionnelle du Québec.

Vincent Orsida durant un entraînement de son équipe.

«À Sherbrooke, sur 4 500 licenciés, 3 500 se concentrent sur le soccer récréatif. »

Et celui de la MLS?

J’ai plutôt une idée personnelle de la MLS. Pour moi, c’est un sport-spectacle à l’américaine. Je suis allé voir l’Impact Montréal et les gens veulent vraiment voir un show. Surtout qu’à l’époque il y avait des joueurs comme Drogba et Nesta. Il n’y a pas une obsession du résultat. Après, globalement, le niveau est moyen et je pense que c’est l’apport des expatriés qui fera grandir ce championnat, j’en suis certain.

Est-ce que le soccer est-il en train de se faire une place au sein des «sports nord-américains»?

On ne s’en rend pas compte, mais le soccer est le sport le plus pratiqué au Canada. La seule différence, c’est que la plupart des joueurs le font de manière récréative et non compétitive. C’est-à-dire, que les équipes s’inscrivent dans des ligues locales et jouent entre elles sans objectif de résultat. Pendant l’autre partie du temps, ces jeunes pratiquent évidemment d’autres sports et notamment les intouchables, hockey sur glace et football américain. Peut-être moins important en nombre, mais pas le même niveau de notoriété. À Sherbrooke, sur 4 500 licenciés, 3 500 ont du soccer récréatif par exemple. Aujourd’hui, j’ai 4 joueurs sur 5 qui viennent faire du récréatif et le reste participe à la compétition.

«Je suis ambitieux donc pourquoi ne pas aller voir plus haut. »

À l’avenir, avez-vous encore des projets Outre-Atlantique?

Franchement, je ne suis pas carriériste. J’ai la chance d’avoir pu voyager grâce à ma passion et je n’ai encore que 37 ans donc j’ai encore du temps devant moi. Je suis ambitieux donc pourquoi ne pas aller voir plus haut. Actuellement, je passe mes diplômes avec Soccer Canada (fédération canadienne de football, ndlr). Si j’ai la chance de pouvoir servir à plus haut niveau, je ne dirais pas non. Je pense que j’ai encore des choses à accomplir, je me sens bien au Canada, mes filles ont une scolarité fantastique. Mon obsession est plus de profiter à fond de ma famille, ce que je ne pouvais pas faire en France. Pourtant, j’en ai du boulot. Aujourd’hui, je pense que ce qui pourrait me faire revoir ces priorités, c’est un autre défi à l’étranger. Voyager reste quelque chose qui m’anime, et si j’ai la possibilité de pouvoir suivre quelqu’un, peut-être que je le ferais. Mais pour le moment, je ne prendrais pas de risque.

La Coupe du Monde 2026 peut-elle permettre d’encore et développer le soccer en Amérique du Nord?

Je pense que oui car les retombées seront sûrement fantastiques. Mais là-bas, la culture est vraiment locale et beaucoup de gens se sont opposés à l’organisation du Mondial. Notamment au niveau du coût. Il préfèrerait recevoir le championnat du monde de Hockey. J’ai envie de dire que la fédération est à fond. Est-ce que ça va marcher? Je ne sais pas mais je l’espère car je sens qu’il y a un vrai potentiel dans le pays. La fédération structure totalement les clubs par niveau actuellement. On pourra faire un bilan dans quelques années je pense.

«Les expatriés ne sont pas assez connus en France. »

Des conseils à donner aux personnes qui aimeraient vivre le «rêve américain»?

Je n’ai pas vraiment de conseil à donner à part vivez vos rêves! Une aventure comme celle-là, c’est accessible pour tout le monde et je dirais que c’est à faire. On découvre des nouvelles personnes, des nouvelles cultures. Un jour, je rentrerais certainement en France, mais pour l’instant je vis mon rêve américain à fond. Après, il y a l’acclimatation qui compte beaucoup. La plupart des Français que j’ai rencontré m’ont dit: soit tu pars au bout d’une semaine car c’est dur à vivre, soit à l’inverse tu tombes amoureux et tu ne veux plus partir. Il y a du travail à gogo, c’est fantastique. Les postes là-bas sont très stables et tu peux faire carrière des années. Ce qui n’est pas vraiment le cas en Europe. Il y a une seule chose que je ne trouve pas correcte, c’est que les expatriés ne sont pas assez intéressants en France. À l’heure actuelle, on me demande de passer des unités de gestion pour passer mon DES Je gère actuellement des clubs de plus de 4 000 licenciés et il n’y a pas de possibilité de faire l’équivalence de mes diplômes car « les années à l’étranger ne comptent pas » pour les instances françaises

Un dernier mot?

J’aimerais surtout passer un message à la France. À toute ma famille, mes amis, mes proches, mes anciens clubs et leurs dirigeants. J’ai une pensée énorme pour eux et leur donne toute ma force dans cette période difficile. Un grand merci également à Actufoot, et MyCoach qui permettent de faire vivre le pied amateur même dans les moments les plus durs. Vous êtes loin des yeux, mais près du coeur. En espérant, vous revoir le plus vite possible.



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