Un camp abritant quelque 500 migrants démanté à Calais


Un important dispositif policier a été mobilisé, vendredi 4 juin 2021, pour procéder à l'évacuation d'environ 600 migrants qui occupaient depuis quelques mois la friche « Magnesia », sur la route de Saint-Omer, près de Calais.

Opération de « tranquillité publique » pour les autorités, coup d’épée dans l’eau pour les associations : les forces de l’ordre ont mené, vendredi 4 juin, un nouveau démantèlement à Calais, celui d’un camp abritant quelque 500 migrants, installés dans les hangars d ‘une ancienne friche.

« Sur instruction du ministre de l’intérieur et après décision de justice, une opération de mise à l’abri de migrants installés sans autorisation dans plusieurs hangars situés route de Saint-Omer à Calais, à proximité du centre hospitalier », a été engagé à 6 heures, a annoncé la préfecture dans un communiqué. L’opération, qui s’est terminée en fin de matinée, a permis l’évacuation d’environ 500 personnes de la friche Magnesia à bord de vingt-cinq bus, at-elle détaillée. Il s’agit notamment de Soudanais et d’Iraniens.

Selon les autorités, « une trentaine d’enfants » figuraient dans cette population, qui a « augmenté ces dernières semaines ». « Ces occupations ont généré des troubles graves à l’ordre public, à la tranquillité publique, en particulier pour les 50 familles riveraines résidant à proximité », ajoute la préfecture, évoquant un « problème croissant de salubrité publique ». Quelque 300 policiers ont été mobilisés pour cette opération, selon une source policière.

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« Merci aux forces de l’ordre mobilisé et aux agents qui assurent leur mise à l’abri », un tweeté le ministre de l’intérieur, Gérald Darmanin.

« Tout le monde tourne en rond »

Mercredi, le président des Hauts-de-France, Xavier Bertrand (ex-Les Républicains), candidat à sa propre succession et candidat déclaré pour la présidentielle, et le maire de Calais, Natacha Bouchart (LR), avaient demandé au ministre de l ‘intérieur le démantèlement de ce nouveau camp. Ils mettaient en avant le risque de « reconstitution d’une jungle », en référence au bidonville démanté à Calais en 2016, après avoir accueilli jusqu’à 9 000 migrants.

La zone désaffectée visée vendredi, située dans le sud-est de la ville, avait été le théâtre de rixes dans la nuit de mardi à mercredi, impliquant « une trentaine de personnes » et entraînant l’intervention d’une cinquantaine de policiers et CRS. Plusieurs responsables politiques, dont Marine Le Pen, avaient reçu leur soutien aux forces de l’ordre.

Ce que les autorités appellent « mise à l’abri » consiste en l’évacuation des migrants vers les structures d’accueil, dans les Hauts-de-France ou ailleurs dans le pays. Ce type d’opérations, visant des regroupements plus ou moins importants, est régulier à Calais, où des centaines de migrants continuent toujours d’affluer dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre. La préfecture recense quelque 700 personnes dans le Calaisis, les associations plus d’un millier. En 2020, plus de 9 500 traversées ou tentatives de traversée de la Manche ont été recensées par les autorités françaises, quatre fois plus qu’en 2019.

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Le 26 mai, Xavier Bertrand avait fustigé « l’hypocrisie des Britanniques » et « l’inaction du gouvernement français » face à ce migratoire, et appelé à la renégociation des accords du Touquet de 2003, qui ont transféré le trafic à Calais les contrôles de la frontière franco-britannique. Lors d’un débat électoral régional mercredi, le double candidat avait aussi demandé pour la sécurité du Calaisis que « l’état appliqué la loi » en expulsant les migrants interpellés sans titre de séjour.

Mais les associations dénoncent une politique « incohérente » et le manque de solution pérenne. Au début de mai, elles s’étaient aussi émues d’une « inversion des valeurs » sur place, diabolisant les actions de solidarité comme les distributions de repas quotidiens. Auparavant, la Défenseure des droits avait dénoncé « la volonté d’invisibiliser » les migrants, et la Commission consultative des droits de l’homme ont évoqué une violation de leurs « droits fondamentaux ».

« De toute façon, les personnes se déplacent, elles vont ailleurs. C’est un parcours sans fin. On ne comprend pas pourquoi cette politique continue, tout le monde tourne en rond : les exilés, les autorités et les associations », a réagi François Guennoc, président de l’Auberge des migrants. « Ce qui est plus grave, c’est qu’à chaque fois les personnes perdent des affaires personnelles – une tente, une couverture –, et on doit travailler d’autant plus pour leur offrir le minimum », à-il regretté.

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Le Monde avec l’AFP



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