Malus automobile au poids, une nouvelle taxe plus symbolique qu’efficace?


Alors que son champ d’application serait finalement réduit à très peu de véhicules vendus en France, passer d’un malus au poids est très mal vécu par les professionnels de l’automobile, signe selon eux d’un manque de cohérence et de visibilité.

Le feuilleton du malus au poids se poursuit. Dernier épisode, la ministre de la Transition écologique Barbara Pompili a indiqué ce jeudi qu’il sera finalement bien mis en place l’an prochain, confirmant une information des Echos. Après avoir obtenu l’abandon de cette mesure, Bercy aurait donc perdu son bras de fer dans ce dossier.

La fiscalité, qui devrait faire l’objet d’un amendement au projet de loi de finances 2021, sera de 10 euros par kilo au-delà de 1800 kg, a précisé le ministère à l’AFP.

Barbara Pompili a également précisé que les véhicules électriques (a priori 100% électriques et hybrides rechargeables) seraient exemptés de ce nouveau malus. « Des ajustements pour les familles nombreuses » sont également prévus.

Un cadre confirmé ce vendredi par Bruno Le Maire, invité de Jean-Jacques Bourdin.

« Je veux apporter deux précisions importantes: il y a une alternative (…) ceux qui sont électriques ou hybrides rechageables et qui émettent donc peu de CO2 seront exclus de cette taxation. Et par ailleurs (…), pour les familles nombreuses , tous les véhicules de 7 places (…) ont une réduction de cette taxe « , a précisé le ministre de l’Economie.

Combien de véhicules concernés?

Alors que la Convention citoyenne sur le climat, qui avait relancé cette idée d’un malus au poids parmi ses 150 propositions, proposait un seuil de déclenchement à 1400 kg, ce sera finalement 400 kg de plus.

Un niveau qui épargnerait la production française: aucun véhicule particulier qui serait éligible à ce malus n’est produit actuellement en France, notez le cabinet Inovev. Seul le DS7 Crossback en version hybride rechargeable, produit à Mulhouse, affiche 1825 kg sur la balance, mais sa motorisation électrifiée lui ferait échapper à une surtaxe.

Cet amendement concerne au maximum 1% des véhicules particuliers thermiques neufs vendus en France sur les 9 premiers mois de 2020 et 2% en 2019, souligne également Inovev. On retrouve principalement des SUV, 73% en 2020, et des grandes berlines.

Les véhicules des marques des groupes français PSA (Opel inclus) et Renault (Dacia inclus et en ajout Nissan) ne seraient pas non plus touchés par ce malus au poids. Ce sont les marques allemandes qui subiraient le plus cette mesure: elles vendaient 62% des véhicules particuliers de plus de 1800 kg en 2019, 56% cette année, toujours selon Inovev.

Une mesure qui agace la filière

Si ce seuil aurait été donc délibérément choisi pour ne pas pénaliser l’industrie française, l’obtention de ce malus au poids passe mal auprès des professionnels. Des arguments représailles par l’ensemble des représentants du secteur dans une tribune collective publiée dans les Echos ce jeudi.

Rien n’est vraiment sur la table, aucun amendement n’a encore été déposé au projet de loi de finances 2021 et il n’y a pas eu de concertation « , réagit une porte-parole du CNPA (Conseil national des professionnels de l ‘voiture).

Après le durcissement du malus CO2, avec un plafond à 40.000 euros l’an prochain, ou encore l’exclusion du diesel de la prime à la conversion, le CNPA dénonce « un manque de cohérence et de visibilité dans les politiques publiques ». Le malus au poids version 1800 kg pourrait donc passer à 1400 kg rapidement, un seuil beaucoup plus pénalisant pour les industriels français.

Le gouvernement s’est engagé à faire baisser le seuil de déclenchement du malus CO2 de 3 grammes par an. Ou, en 2021, il passera de 138 à 131 g / km, soit une baisse de 7 grammes beaucoup plus importante que prévue « , continue la porte-parole du CNPA.

Des pro-malus au poids en partie déçus

Si la mesure inquiète donc les professionnels de l’automobile, elle reçoit un accueil mitigé de la partie de ceux qui souhaitaient la mise en place de ce malus au poids.

Réagissant à ce seuil de 1800 kg au lieu des 1400 souhaités par la Convention citoyenne, son représentant Grégoire Fraty a indiqué à l’AFP qu’elle allait « malgré tout dans le bon sens ».

« On a enfin de gagner un arbitrage », at-il ajouté, sachant que le président de la République s’est engagé à retenir 146 des 149 propositions de la Convention.

A l’origine d’un rapport dénonçant le drame environnemental des SUV, le WWF France « se félicite de cet arbitrage gouvernemental historique ».

Mais l’ONG exprime par ailleurs sa déception: « le projet du gouvernement demeure en-deçà de l’ambition nécessaire pour faire reculer les ventes de SUV et donner au parc automobile une orientation compatible avec les objectifs climatiques et le pouvoir d’achat des ménages « .

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