L’armée française chasse les orpailleurs illégaux qui saccagent la région amazonienne


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Saint-Laurent du Maroni (France) (AFP) – Au plus profond de la jungle du territoire français d’outre-mer de la Guyane française, l’armée est engagée dans une bataille d’usure contre les orpailleurs illégaux qui ont détruit des milliers d’hectares de la précieuse forêt amazonienne.

La Guyane française, de la taille du Portugal sur la côte nord de l’Amérique du Sud et presque entièrement couverte de forêts, a une longue histoire d’extraction d’or à petite échelle, légale et illégale.

Mais les prix élevés de l’or ont accéléré la ruée vers le métal précieux, avec des milliers de mineurs du Brésil voisin affluant à travers la frontière pour essayer d’en retirer de l’argent.

Leur activité a laissé des entailles brunes sans arbres dans le paysage, parsemées de flaques d’eau empoisonnée par le mercure utilisé pour extraire l’or du sol.

Attraper les mineurs illégaux connus sous le nom de « garimpeiros » sur le fait est une tâche presque impossible, mais la France est déterminée à essayer de protéger son petit coin de l’Amazonie.

Enterrer les preuves

Sur un petit affluent du fleuve Maroni, la principale voie navigable qui traverse la Guyane vers le nord jusqu’à l’océan Atlantique, les troupes françaises effectuent un raid sur un site minier illégal.

Mais au moment où ils arrivent en canoë, les armes à feu prêtes, les mineurs se sont fondus dans la forêt après avoir reçu un avertissement des vigies.

Les troupes parviennent à appréhender deux travailleurs sans papiers sur le site mais ils n’ont pas été pris en flagrant délit, ils sont donc libérés.

Les troupes françaises sont plus nombreuses que les orpailleurs illégaux en Guyane française, avec près de 1 000 soldats contre 9 000 prospecteurs.
Les troupes françaises sont plus nombreuses que les orpailleurs illégaux en Guyane française, avec près de 1 000 soldats contre 9 000 prospecteurs. jody amiet AFP

Cinq soldats en treillis dévalent ensuite une berge dans la fosse minière remplie d’eau à la recherche d’équipements cachés.

En prenant soin de ne pas s’éclabousser le visage avec le liquide toxique, ils récupèrent un moteur et deux pompes mécaniques qu’ils détruisent.

Signe que le site pourrait être réactivé peu après le départ des troupes, deux hommes et deux femmes portant des bottes en caoutchouc s’attardent à proximité dans la forêt.

« Si nous détruisons leur matériel et qu’ils reviennent toujours, cela montre qu’il s’agit d’un site important pour eux », a déclaré le sergent d’état-major Olivier, dont le nom complet n’a pas été divulgué pour des raisons de sécurité.

Une chaussure d’enfant et une poupée jetée par terre suggèrent que cette petite communauté de hors-la-loi comprend des enfants.

Mais à certains endroits, les garimpeiros, qui utilisent l’or pour acheter du matériel aux commerçants chinois de l’autre côté du fleuve Maroni au Suriname, sont accusés d’introduire la prostitution et la violence dans la forêt.

« J’ai vu un lit à baldaquin, une moustiquaire et des préservatifs éparpillés partout » sur un site abandonné, a déclaré Laura, une officier de police militaire.

Rivières empoisonnées

Les autorités de Guyane française estiment que 400 hectares de forêt sont détruits chaque année par l’exploitation minière illégale, qui menace la biodiversité dans cette partie relativement intacte du bassin amazonien.

Arnaud Ancelin, directeur adjoint du parc amazonien de Guyane, une zone protégée couvrant 34 000 kilomètres carrés (13 000 milles carrés) de forêt tropicale, a déclaré que le ruissellement de certains sites miniers a créé des torrents de boue contenant du mercure « qui bloquent les branchies des poissons » et menacent la survie de leurs prédateurs, dont la loutre.

L’utilisation du mercure, interdite en Guyane française depuis 2006, pose également des risques majeurs pour la santé des Amérindiens indigènes, dont l’alimentation est riche en poisson.

Avec 8 000 à 9 000 mineurs illégaux opérant sur environ 150 sites à travers le territoire – contre 110 il y a dix ans – les près de 1 000 soldats français déployés pour lutter contre les prospecteurs ont du mal à suivre.

Des tonnes d’or

Les garimpeiros sont les plus petits maillons d’une chaîne, où ceux qui ont les mains dans la boue sont payés une somme dérisoire tandis que ceux chargés du transport de l’or font la course le long du fleuve dans des bateaux à moteur.

Depuis janvier, les autorités ont saisi trois kilogrammes d'or, une fraction des quelque 10 tonnes qui seraient extraites illégalement chaque année.
Depuis janvier, les autorités ont saisi trois kilogrammes d’or, une fraction des quelque 10 tonnes qui seraient extraites illégalement chaque année. jody amiet AFP

« On n’attrape que les petits », a déclaré à l’AFP le procureur de la République de Guyane, Samuel Finielz.

Depuis janvier, les autorités ont saisi trois kilogrammes d’or, une fraction des quelque 10 tonnes qui seraient extraites illégalement chaque année.

Mais Finielz est catégorique sur le fait que les efforts contribuent à éviter que le coin de la Guyane française en Amazonie ne subisse le même sort que celui du Brésil, qui a subi une déforestation massive.

« Nous parvenons à contenir l’exploitation minière illégale et, dans certains cas, à la réduire », a-t-il déclaré. « Mais nous n’arrivons pas à y mettre un terme. »

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