ENTRETIEN. «Le sport appartient à tout le monde», insiste Emmanuelle Bonnet-Oulaldj, candidate


Née à Lisieux, Emmanuelle Bonnet-Oulaldj, 42 ans, a passé la moitié de sa vie en Normandie. Elle copréside la Fédération sportive et gymnique du travail, créée en 1934 au sein du mouvement sportif ouvrier et dans la lutte contre le fascisme, qui compte 270 000 pratiquants. Tout comme Brigitte Henriques et le Nantais Patrice Martin, elle est candidate à la présidence du Comité national olympique et sportif français, le 29 juin 2021.

Pourquoi cette candidature à la présidence du CNOSF?

D’habitude, les élections à la présidence du CNOSF se jouent entre les fédérations olympiques. Moi, je considère qu’il est important que des fédérations non olympiques, multisports, affinitaires peuvent aussi contribuer au débat. Et ce qui m’a décidée à moi lancer, c’est le contexte, économique et social. Je suis préoccupée, pour le sport associatif fédéré, et par les inégalités qui vont exploser. Je considère que le CNOSF doit se confronter à la réalité de la société, et se battre pour que le droit au sport soit une réalité. Pour ça, il faut travailler avec toutes les fédérations. Le sport appartient à tout le monde.

«Faire une activité physique, c’est aussi important que manger»

Cette crise peut-elle ruisseler chez tous les acteurs du sport?

Il y a une vraie crise qui a commencé en 2020 mais qui, selon moi, ne va pas se terminer à la rentrée 2021-2022. C’est ça qui est très préoccupant. La crise du Covid n’est pas une parenthèse, elle va s’installer. Deux hypothèses: soit, en 2021-2022, il y aura une envie de repratiquer, un attrait pour les associations sportives, soit la crise économique et sociale sera telle que la préoccupation première de la population ne sera pas aller trouver une association sportive .

Les milieux populaires n’auront peut-être pas les moyens de prendre trois, quatre inscriptions dans des clubs pour toute la famille. Pourtant, la pratique d’une activité physique est essentielle, on le voit vérifier plus dans cette période où le confinement à des effets psychologiques, physiologiques. Tous les observateurs constatent que les enfants ont déjà des préjudices. Faire une activité physique, c’est aussi important que manger, respirer. Cet enjeu n’a pas été pris assez au sérieux, et il va falloir du temps pour remonter la pente.

photo emmanuelle bonnet-oulaldj.  © dr

Emmanuelle Bonnet-Oulaldj. © DR

Paris 2024 et son héritage, c’est aussi un enjeu à prendre en considération dans votre candidature.

Pour moi, Paris 2024, ça devrait être avant tout une grande fête populaire. Je souhaite que 2024 soit aussi un tournant pour que les politiques publiques sportives soient réellement envisagées en France, et dépassent les 0,2% du budget national. Que tout le monde puisse avoir accès à une forme de compétition adaptée à son niveau de pratique, à ses envies.

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Le CNOSF n’a jamais été présidé par une femme. Votre candidature porte-t-elle un enjeu égalitaire?

Aujourd’hui, il y a toujours des inégalités d’accès au sport entre les hommes et les femmes, il y a toujours des activités trop génrées. Pour moi, ça doit faire l’objet d’un travail dans l’Éducation nationale, et au sein du mouvement sportif fédéré. Nous serons deux candidats (avec Brigitte Henriques), c’est une première et une très bonne nouvelle. Cette campagne sera aussi le moment de mettre en lumière les inégalités d’accès aux postes de dirigeantes et tous les freins qui en sont à l’origine.

Le sujet des violences sexuelles dans le sport est aussi un axe de travail.

C’est un ax essentiel. La question des violences sexuelles, mais aussi des violences homophobes, du racisme, qui est très présent dans le sport. Il faut accélérer dans les moyens de prévention. Je trouve qu’on est beaucoup trop dans la réaction, même si elle est nécessaire. Il faut essayer de comprendre les mécanismes qui produisent ces violences dans le sport, et accompagner les victimes, parce qu’en ont besoin.



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