«Écran de fumée de Covid»: les élections anticipées en Tasmanie peuvent-elles masquer la crise du logement et de la santé? | Élection en Tasmanie 2021

L’après-midi avant que le premier ministre de Tasmanie, Peter Gutwein, n’annonce les élections, son gouvernement a publié deux informations révélant la profondeur des problèmes majeurs auxquels l’État est confronté.

L’un d’eux montrait que les listes d’attente des hôpitaux publics avaient atteint des niveaux records. Le nombre de personnes en attente d’un rendez-vous ambulatoire dépasse désormais les 51 000 personnes – près d’un dixième de la population de l’État insulaire et en hausse de 11% en seulement six mois.

L’autre illustre une augmentation similaire du nombre de personnes en attente d’un logement social. Il se situe maintenant à plus de 3800 – 9% de plus qu’il y a un an.

Que la santé et le logement vont mal en Tasmanie n’est pas une idée nouvelle. Le premier apparaît dans un état de crise perpétuel, avec des histoires d’infirmières obligées de travailler en double poste en raison de pénuries, les services d’urgence luttant pour faire face et les ambulances forcées de faire la queue à l’extérieur avant l’admission des patients. Ce dernier problème s’est aggravé à mesure que le loyer et les prix des logements ont grimpé en flèche et que plus de personnes que jamais ont du mal à trouver un logement abordable.

Mais il était encore frappant de constater à quel point ils ont reçu peu d’attention au cours de la première semaine d’une campagne électorale qui a eu du mal à trouver ses marques depuis que Gutwein a annoncé qu’elle aurait lieu un an plus tôt que nécessaire.

Le voyage de Gutwein chez le gouverneur pour dissoudre la chambre basse de Tasmanie est survenu alors que l’État était également sur le point de commencer à faire face à une crise d’abus sexuels sur enfants, une série de révélations remontant à des décennies ayant incité une commission d’enquête sur la façon dont la santé, l’éducation et les systèmes de détention pour jeunes traitent les plaintes pour abus.

Et cela s’est produit avant que le gouvernement n’ait tenu certains des engagements les plus importants pris lors de la dernière élection en 2018. Peut-être plus particulièrement, il n’a pas encore introduit de législation pour changer la façon dont les machines de poker sont détenues et imposées dans l’État – une question très controversée. il y a trois ans, lorsque l’industrie hôtelière a lancé une campagne financée de manière extravagante pour attaquer l’opposition travailliste dirigée par Rebecca White pour sa promesse d’interdire les machines à sous dans les pubs et les clubs.

Cela a laissé certains Tasmaniens se demander pourquoi on leur demande maintenant de se rendre aux urnes.

«La réponse assez clairement est que le Premier ministre veut simplement capitaliser sur l’humeur pro-sortante après Covid-19 qui a renvoyé des gouvernements dans quatre autres États et territoires», déclare Saul Eslake, un économiste indépendant qui rédige une analyse annuelle de l’État pour la Chambre de commerce et d’industrie de Tasmanie. «Je ne sais pas si les électeurs verront à travers cela ou non.»

Gutwein occupe le poste le plus élevé un peu plus d’un an depuis la démission inattendue de Will Hodgman, qui en 2018 n’est devenu que le deuxième Premier ministre libéral de l’histoire de l’État à remporter la majorité parlementaire lors d’élections consécutives.

En tant que premier ministre et trésorier, Gutwein a été largement reconnu pour avoir adopté une approche claire et décisive de la pandémie qui a aidé la Tasmanie à avoir l’un des taux d’infection par habitant les plus bas du pays. Il a fermé l’État du reste du pays et a ciblé l’aide en cas de pandémie sur les petites entreprises et certains groupes ignorés par ses collègues fédéraux, y compris les étudiants internationaux et les travailleurs occasionnels non couverts par le gardien de l’emploi.

Cela a contribué à adoucir ce qui était auparavant une image publique parfois agressive et, selon les sondages publics, s’est traduit par un fort soutien de la communauté. Une enquête EMRS en février a révélé que les libéraux (52%) avaient près de deux fois plus de soutien que les travaillistes (27%). Les Verts, dirigés par l’ancien ministre Cassy O’Connor, siégeaient à 14%. Sur la question de savoir qui était le premier ministre préféré, Gutwein était encore plus en avance – 61% contre 26% pour White.

Le premier ministre a déclaré qu’il n’avait guère d’autre choix que de déclencher des élections après que son gouvernement soit tombé en minorité en raison du départ de Sue Hickey, une libérale renégate qui avait accepté le soutien des travaillistes et des verts pour remporter la présidence du président, critiquait régulièrement le gouvernement et – à la surprise de personne – on lui a dit qu’elle ne serait pas candidate au gouvernement aux prochaines élections.

Gutwein a affirmé que ce changement au Parlement pourrait déclencher «une perte de confiance qui entraînera une perte d’emplois qui aura un impact sur notre économie. C’est quelque chose que nous ne pouvons tout simplement pas avoir.

En réalité, Hickey avait promis l’approvisionnement du gouvernement et la confiance dans le parlement, et il a été révélé deux jours après le déclenchement des élections que les libéraux avaient recruté Madeleine Ogilvie, une ancienne députée travailliste devenue indépendante, rétablissant effectivement leur majorité. Cela signifiait que la justification du gouvernement pour une élection s’était évaporée en moins de 48 heures.

Est-ce important? Meg Webb, un éminent défenseur de la politique sociale devenu député indépendant à la chambre haute de l’État qui n’est pas réélu cette année, pense que oui. Elle dit qu’elle a été surprise que le gouverneur de l’État, Kate Warner, ait accepté de dissoudre le Parlement sans demander au préalable à Gutwein de tester son soutien sur le parquet.

«C’est une décision entièrement intéressée par le gouvernement. Il s’agit d’utiliser l’écran de fumée de Covid pour éviter de fonctionner sur leur dossier complet », explique Webb.

«C’est décevant car à un moment où Covid a incité les gens à rechercher un meilleur style de politique, les électeurs de Tasmanie ont été servis de manière flagrante à l’auto-préservation politique cynique.

Webb souligne que les élections se déroulent maintenant avant le budget de l’État, qui exposera tout l’impact économique de Covid, et avant que le gouvernement n’ait promis des lois pour durcir les lois de divulgation des donateurs politiques les plus faibles du pays. Gutwein a plutôt promis que les libéraux divulgueraient volontairement tout don de plus de 5 000 $.

«Ils avaient le choix entre tenir leurs promesses ou donner la priorité à leurs propres intérêts, et leur choix ne fera qu’éroder davantage la confiance des gens dans la politique», dit-elle.

Un gouvernement majoritaire n’est pas garanti

L’ajout d’Ogilvie signifie que le gouvernement se rendra aux élections avec 13 députés dans la chambre d’assemblée de 25 sièges. Les travaillistes en ont neuf, les Verts deux et l’ex-libérale Sue Hickey est la seule indépendante.

Les travaillistes n’ont aucune chance de revendiquer une majorité, mais les caprices du système de vote multipartite Hare-Clark en Tasmanie signifient que les libéraux ne sont pas non plus garantis de traduire ce qui devrait être un fort soutien public en un seul.

La question le soir des élections sera de savoir si Gutwein peut revendiquer les 13 sièges dont il a besoin pour gouverner de son propre chef ou s’il sera forcé de tenter de gouverner à partir d’une minorité – ce qu’il a déclaré ne pas vouloir faire.

L’État élit cinq députés pour chacun de ses cinq électorats: Braddon dans le nord-ouest, Bass dans le nord, Clark et Franklin dans le sud et Lyon, un grand siège rural à travers le centre de l’île. Le gouvernement est particulièrement fort à Bass et Braddon, et devrait conserver au moins trois députés dans chacun. Il devrait également détenir ses trois membres à Lyon et au moins deux à Franklin.

Mais Clark, le siège relativement à gauche anciennement connu sous le nom de Denison qui accueille le centre et le nord de Hobart, est plus difficile et presque impossible à prévoir en raison de la présence de deux indépendants de haut niveau – Hickey et Kristie Johnston, un maire local populaire. .

Eslake dit que le gouvernement se rend aux élections avec une histoire économique raisonnable à raconter, du moins en surface. Après une période de déclin, la population de l’État croît à un rythme plus rapide que la moyenne nationale. Il comprend une augmentation notable du nombre de jeunes adultes – ceux dans la vingtaine et la trentaine – qui ont choisi de rester après l’école plutôt que de chercher des opportunités ailleurs.

«Je pense qu’il est juste de dire que l’intendance généralement compétente du gouvernement a été un facteur à cet égard», dit Eslake. «Vous pouvez trouver un emploi, démarrer une entreprise, acheter une maison et voir la valeur augmenter, et ce sont des choses importantes pour maintenir la confiance.»

Pour sa part, le parti travailliste a été accusé d’avoir passé les trois ans dans la quasi-clandestinité depuis sa perte meurtrière en 2018. White avait été au travail juste un an avant les dernières élections, et a conservé la direction depuis malgré une campagne chuchotante qu’elle le ferait. faire face à un défi du rival interne David O’Byrne.

Son autorité interne a pris un coup dur au cours de la première semaine de la campagne lorsque des courtiers en puissance de la gauche du parti ont bloqué la présélection de Dean Winter, le maire de la municipalité méridionale de Kingborough, contre son gré. Winter était considéré comme un vainqueur probable du vote et un futur dirigeant potentiel, et son rejet a été condamné par des personnalités du parti.

Sur le plan politique, le parti travailliste s’est concentré sur l’avenir de Tafe et a été critiqué pour un renversement à 180 degrés sur la question de savoir si le jeu devrait être autorisé dans les pubs et les clubs. S’étant fermement opposé à l’autorisation des machines de poker dans la communauté il y a trois ans, il a été révélé cette semaine que l’opposition avait maintenant signé un accord secret avec un groupe de pression de l’industrie hôtelière soutenant les droits des propriétaires de pubs et de clubs à les avoir.

Pour le gouvernement, le message central au milieu d’une série d’annonces relativement modestes a été le besoin de cohérence et de certitude dans les moments difficiles.

Eslake dit que cela ne suffira pas à résoudre certains des problèmes majeurs auxquels l’État est confronté. Bien qu’il pense que Gutwein sera récompensé pour sa gestion de Covid, il dit que le premier ministre a montré peu d’intérêt à utiliser ce capital politique pour résoudre les problèmes de santé et d’éducation, qui sont tous deux inférieurs à la norme nationale, ou pour réorganiser un code fiscal inefficace. Et il prévient que les systèmes de santé et de logement sous-financés de l’État ne feront que subir une pression croissante à mesure que la population augmentera.

«La réalité est que le gouvernement a géré le magasin avec beaucoup de compétence», dit-il. « Mais il n’a absolument aucun intérêt à faire quoi que ce soit qui pourrait être politiquement difficile ou nécessaire pour créer un magasin plus grand et meilleur. »