Cautionnement et fraude paulienne – Contrat et obligations


Fraus omnia corrumpit… L’adage est bien connu et permet parfois de s’affranchir de l’une des conditions élémentaires de l’action paulienne (sur laquelle, v. L. Sautonie-Laguionie, La fraude paulienne, préf. G. Wicker, LGDJ, coll. «Bibliothèque de droit privé», 2008, t. 500), comme en témoigne l’arrêt rendu par la chambre commerciale de la Cour de cassation le 24 mars 2021. En l’espèce, par un acte du 14 décembre 2010, une banque a consenti à une société deux prêts, garantis par les cautionnements de M. et Mmoi B…. La société ayant été mise en liquidation judiciaire le 19 mars 2013, la banque a assigné les avertissements en paiement. Au cours de cette instance, elle a découvert que, par un acte sous seing privé du 22 juin 2012, les cautions avaient créé une société civile immobilière, dont le capital social a été divisé en 450 parts, chacun a eu en détenant la moitié et lui attribuant une propriété immobilière, puis, par un acte notarié du même jour, avaient fait tous les deux donation à chacun de leurs deux enfants, de la nue-propriété de 112 parts sociales, de sorte qu’ils ne possédaient plus, chacun , que la pleine propriété, d’une part, sociale et l’usufruit des 224 autres. Par des actes des 20 octobre et 3 novembre 2016, la banque, considérant que cette donation avait eu pour objet d’organiser l’insolvabilité des précautions, les a assignés ainsi que leurs enfants en invoquant la fraude paulienne, sur le fondement de l ‘ article 1341-2 du code civil, afin que lui soient déclarés inopposables, l’apport à la société civile immobilière de l’immeuble litigieux et la donation subséquente.

La cour d’appel de Chambéry, dans un arrêt du 23 mai 2019, déboute la banque, en énonçant que la première condition pour engager l’action paulienne est de disposer d’une créance et qu’il est constant que cette créance, si elle peut ne pas être liquide, doit être certain au moment où le juge statue. Or, par un jugement rendu le 12 juillet 2018 dans l’instance en paiement dirigée contre les époux avertissements, les engagements de ces derniers ont été jugés manifestement disproportionnés à leurs biens et revenus. Par conséquent, au jour où le juge s’est prononcé, la banque avait plus de créance certaine contre les précautions, peu important l’appel qu’elle a formé contre ce jugement. L’arrêt est (heureusement) censuré au visa de l’article 1341-2 du code civil (c’est ainsi, à notre connaissance, le second arrêt de la Cour de cassation à viser ce nouveau texte, issue de l’ordonnance n ° 2016-131 du 10 févr.2016; v. Déjà Civ.3e, 12 nov. 2020, n ° 19-17.156, Dalloz actualité, 15 déc. 2020, obs. A. Cayol; D. 2021. 683 , notez S. Tisseyre ; ibid. 310, obs. R. Boffa et M. Mekki ; Tour….

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