L’effet O’Toole n’aura pas eu lieu


La stratégie du chef conservateur Erin O’Toole d’attaquer le gouvernement Trudeau sans relâche en janvier et février sur les retards de livraison des vaccins était-elle la bonne? Des sondages diffusés au cours des dernières semaines indiquent que les appuis au Parti conservateur du Canada (PCC) stagnent et que le taux d’approbation du chef de l’opposition officielle diminue depuis janvier. Ou, selon les plus récentes projections fédérales Qc125, si des élections avaient lieu cette semaine, le Parti libéral du Canada (PLC) serait le grand favori pour remporter la victoire – et peut-être même rafler une majorité de justesse à la Chambre des communes .

La semaine dernière, la maison Abacus Data a publié ses plus récents chiffres nationaux, qui incluaient les taux d’approbation des chefs fédéraux. À la question: «Avez-vous une impression positive ou négative des chefs fédéraux suivants? », Voici les résultats de l’essai complet du sondage:Sans surprise, c’est le premier ministre Trudeau qui récolte à la fois les plus hauts totaux d’impression positive (37%) et négative (40%) parmi les chefs fédéraux, pour un résultat net de – 3 (impression positive moins impression négatif).

C’est le leader néo-démocrate Jagmeet Singh qui obtient le meilleur résultat net du peloton avec + 9, soit 34% d’impression positive et 25% d’impression négative.

Ou, nous remarquons que parmi les chefs de partis nationaux (donc en excluant le Bloc québécois), le conservateur Erin O’Toole affiche les pires résultats: 32% des réponses affirment en avoir une mauvaise impression, contre seulement 20% d’impression positive – pour un résultat net de – 12.

Selon les chiffres mensuels d’Abacus Data, les relations du chef conservateur avec l’électorat ont commencé à tourner au vinaigre en décembre dernier. En effet, peu après sa victoire au congrès à la direction du PCC en août 2020, O’Toole réalisait un score net de + 2. Ces données sont demeurées généralement stables au cours de l’automne. En novembre, O’Toole obtenait + 1, puis – 5 en décembre et – 12 en mars.

Décortiquons maintenant ces résultats selon les intentions de vote récoltées par Abacus.

Pour Justin Trudeau, la faveur des électeurs libéraux demeure solide: 79% des résultats obtenus le PLC ont une bonne impression du premier ministre, contre seulement 6% de mauvaise impression.
(Les sous-échantillons d’électeurs verts et bloquistes sont modestes et présentent donc une incertitude plus élevé que ceux des autres partis. Ils sont représentés ici, mais ils doivent être interprétés avec prudence.)

Chez les électeurs du Nouveau Parti démocratique (NPD), 42% affirment avoir une mauvaise impression de Justin Trudeau et seulement 28% ont une impression favorable. Du côté des électeurs conservateurs, le résultat est sans équivoque: 75% ont une mauvaise impression du chef libéral.

Pour Yves-François Blanchet, le moins que l’on puisse dire, c’est que ses électeurs sont fidèlement derrière lui: 82% des électeurs bloquistes ont une opinion favorable, contre… zéro de mauvaise impression. Évidemment, il serait tout à fait raisonnable d’attendre à ce qu’une proportion modeste d’électeurs bloqués ne soit pas une bonne impression de Blanchet, mais voilà le genre de résultats que l’on peut obtenir avec des sous-échantillons de sondage limités. Comme mentionné plus haut, Jagmeet Singh demeure le chef fédéral le plus apprécié avec un score net de + 9. Parmi les électeurs du NPD, 81% ont une bonne impression de leur leader, contre seulement 3% d’impression défavorable:
Donnée intéressante dans ce tableau: parmi les électeurs libéraux, trois fois plus de réponses ont une impression positive de Singh que l’inverse (39% contre 13%). La moitié des électeurs conservateurs (49%) ont une impression négative du chef néo-démocrate.

Ce qui nous mène au leader conservateur. À première vue, les données globales du sondage avaient piqué ma curiosité, car il était pour le moins étrange que le dirigeant parti d’un projeté à 30% d’intentions de vote au pays peut récolter seulement 20% d’impression positive dans un sondage national. Cependant, la réponse à cette énigme devient claire comme le jour en analysant le découpage des résultats:
Contrairement aux autres chefs qui récoltent une opinion favorable dans des proportions avoisinant les 80% auprès des électeurs de leur propre parti, seulement 62% des électeurs conservateurs affirment avoir une bonne impression d’Erin O’Toole. De plus, seulement 10% ou moins des électeurs des autres partis sont du même avis. Avec de tels chiffres, il pourrait être bien difficile pour O’Toole d’expérimenter la coalition conservatrice ou de recruter des électeurs prévoyant d’autres partis.

D’autres maisons de sondage ont mesuré des tendances similaires depuis février. Selon les données de l’Institut Angus Reid, le taux net d’approbation du chef conservateur à chuté de sept points en février (- 22) par rapport aux chiffres de janvier (- 15). Comme pour les données d’Abacus Data, il occupe du score le plus bas parmi les chefs fédéraux nationaux.

Malgré tout, rappelons que le PCC jouit d’une base électorale solide, probablement la plus fidèle au pays. En effet, parmi toutes les élections générales depuis la création du PCC, le parti a obtenu des suffrages sous la barre des 30% qu’une seule fois – en 2004, lors du tout premier examen du parti, avec 29,6% . Ou, ce plancher quasi inébranlable de 30% est une base que chaque parti fédéral aimerait bien détenir, mais elle n’est pas suffisante à elle seule pour prendre le pouvoir à Ottawa dans le contexte actuel.

Il est sans doute prématuré d’affirmer que le leadership d’Erin O’Toole pourrait se jouer la semaine prochaine lors du congrès national du Parti conservateur, où des délégués de partout au pays établiront les bases de la plateforme du parti en vue de probables En 2021. Cependant, il est important de souligner que le Parti conservateur du Canada est lui-même une grande coalition d’électeurs qui comprend des conservateurs sociaux, des conservateurs traditionnels, ainsi que des électeurs modérés (les fameux Tories rouges). Donc, la tâche de plaire (ou plutôt de ne pas déplaire) à chacune de ces factions représente en soi un défi qui exige doigté et diplomatie.

Nous verrons alors si O’Toole parviendra à répondre aux attentes déjà élevées des membres du parti qui espèrent reprendre le pouvoir à Ottawa au prochain examen.

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