Le G20 pourrait améliorer la réforme fiscale mondiale «unilatérale»


L’auteur est directeur général du Tax Justice Network

Après l’engagement retentissant des ministres des Finances du G7 en faveur d’importantes réformes fiscales internationales le week-end dernier, l’accord semble moins clair. Les mesures ultérieures de retrait – de l’espoir du Royaume-Uni d’une dérogation pour le financement aux inquiétudes de la Chine concernant ses zones économiques spéciales – ont été considérées par certains comme une menace pour l’initiative. Mais cette bousculade est tout à fait nécessaire — et même positive.

Il s’agira probablement des plus grandes réformes des règles fiscales internationales depuis un siècle. Ils peuvent générer plus de mille milliards de dollars de revenus supplémentaires. L’engagement politique aux niveaux national et international est essentiel pour obtenir un résultat équitable et garantir l’engagement des parties.

Le processus de l’OCDE visant à réformer les règles fiscales internationales est en cours depuis janvier 2019 et se terminera probablement lors de la réunion du G20 d’octobre. Mais la réunion de juillet de ce dernier sera déterminante pour jeter les bases d’un accord sur la portée et l’ambition des nouveaux droits d’imposition sur les entreprises (« premier pilier » des réformes), et sur l’assiette et le taux de l’impôt minimum global (« pilier deux »).

Les mêmes problèmes se posent pour les deux : quelle sera l’ampleur des revenus supplémentaires et qui les recevra ? Et jusqu’où les politiques nationales des pays seront-elles contraintes, et à quel prix ?

Le premier pilier est relativement petit, mais politiquement important. La colère du public face à l’échec de l’imposition des multinationales se concentre sur les grandes entreprises technologiques qui peuvent concurrencer les entreprises locales plus fortement taxées. Les propositions du groupe des pays à faible revenu du G24 et du Forum de l’administration fiscale africaine envisagent de répartir tous les bénéfices mondiaux en fonction de la localisation des activités commerciales des multinationales.

Mais l’OCDE l’a considérablement réduit, et le G7 l’a encore réduit. Désormais, seules 100 multinationales sont susceptibles d’être affectées, et seule une fraction de leurs bénéfices au-dessus d’une marge de 10 pour cent sera attribuée à leur juridiction de vente (sans pondération pour les juridictions où l’emploi a lieu). L’OCDE estime que cela générera des revenus supplémentaires de 5 à 12 milliards de dollars par an, soit une réduction de 2 à 5 % des pertes annuelles estimées à 245 milliards de dollars dues au transfert de bénéfices.

Les avantages du deuxième pilier sont beaucoup plus importants. L’OCDE estime qu’un taux d’imposition minimum mondial de 12,5 %, qui s’appliquerait à peut-être 8 000 multinationales, pourrait générer près de 100 milliards de dollars de revenus supplémentaires par an. Nos estimations montrent qu’un taux minimum de 15 % pourrait rapporter jusqu’à 275 milliards de dollars par an. Un taux de 21 pour cent, favorisé par l’administration Biden, ou un taux de 25 pour cent comme recommandé par la Commission indépendante pour la réforme de la fiscalité internationale des entreprises, augmenterait bien davantage.

L’approche de l’OCDE privilégie les pays du siège. Cela signifie que si une multinationale française transfère ses bénéfices hors du Brésil pour bénéficier du taux d’imposition de 0 pour cent des Bermudes, ce serait la France qui pourrait « compléter » les impôts sur ces bénéfices à 15 pour cent. Comme la plupart des plus grandes multinationales ont leur siège dans les pays de l’OCDE, la majorité des bénéfices leur irait. Les membres du G7, qui représentent 10 pour cent de la population mondiale, devraient recevoir plus de 60 pour cent des revenus supplémentaires.

L’alternative proposée par le Tax Justice Network, le Minimum Effective Tax Rate (METR), répartirait les bénéfices sous-taxés en fonction de la localisation des activités réelles des multinationales. Ils seraient imposés au taux global national, plutôt qu’au minimum mondial convenu, afin d’éviter d’inciter au transfert de bénéfices. Un taux de 15 pour cent permettrait d’augmenter jusqu’à 460 milliards de dollars de revenus supplémentaires. Pour les principaux membres du G20 en dehors du G7, la différence est flagrante. À un taux de 15 %, l’Inde pourrait gagner 13 milliards de dollars au lieu de 4 milliards de dollars ; et la Chine 72 milliards de dollars au lieu de 32 milliards de dollars. Des revenus supplémentaires doubleraient voire tripleraient pour des pays comme le Brésil et l’Afrique du Sud.

Comme la Chine, de nombreux pays craignent que les avantages d’une réduction des abus fiscaux ne compromettent leur capacité à offrir aux entreprises des incitations à localiser une activité réelle. C’est peu probable si l’OCDE insiste pour privilégier les pays du siège. D’autres États, comme le Royaume-Uni, veulent protéger « leurs » multinationales, mais se battre pour des échappatoires éroderait les avantages de la coopération.

L’impôt minimum mondial constitue une menace sérieuse pour le modèle économique de nombreuses juridictions, comme l’Irlande, avec son taux d’imposition effectif moyen pour les multinationales américaines de seulement 2 %. Mais le modèle est antisocial et insoutenable.

Il y a un grand marché à conclure. Fondamentalement, les réformes visent à renouveler la souveraineté budgétaire par une plus grande coopération. Cela nécessite une inclusion mondiale et une transparence des négociations, ce qui suggère que les futures réformes fiscales devraient avoir lieu sous les auspices de l’ONU. En attendant, les membres du G20 ont la possibilité d’améliorer l’accord unilatéral proposé par un groupe de pays riches et de jeter les bases d’un meilleur accord qui peut tenir.

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