Le commerce extérieur de l’Union européenne


L’Union européenne est la première puissance commerciale au monde, et possède des accords de libre-échange avec des dizaines de partenaires économiques. Sa politique commerciale tente désormais d’allier libre-échange, lutte contre la concurrence déloyale et respect de l’environnement.

La politique commerciale de l'Union européenne relève pour l'essentiel de sa compétence exclusive - Crédits : AvigatorPhotographer / iStock
La politique commerciale de l’Union européenne relève pour l’essentiel de sa compétence exclusive – Crédits : AvigatorPhotographer / iStock

L’Union européenne à 27 est la deuxième puissance commerciale du monde en matière de biens, mais aussi le plus grand exportateur mondial de produits manufacturés et de services, et le premier pôle touristique mondial.

la somme de ses importations et de ses exportations représentait 4 094 milliards d’euros en 2019. Elle devançait de peu la Chine et se situait derrière les Etats-Unis : à eux trois, ils représentaient 46 % du commerce international de marchandises en 2019.

Hors commerce entre Etats membres (qui représente environ 1,5 fois le montant du commerce extérieur), les échanges de biens (exportations et importations) de l’UE avec le reste du monde représentent environ 15 % du commerce mondial de biens. En 2020, les exportations européennes atteignaient 174,9 milliards d’euros, et les importations 144,8 milliards d’euros. La balance commerciale, excédentaire depuis 2012, a alors atteint 30,1 milliards d’euros.

Si l’UE-27 se place en première puissance commerciale au monde, elle n’est en 2019 que deuxième importatrice (devancée par les Etats-Unis) et deuxième exportatrice de biens (devancée par la Chine).

En ce qui concerne le commerce de biens, ses principaux partenaires commerciaux sont la Chine, plus importante destination des exportations et des importations européennes en 2020 (pour un flux total de 586 milliards d’euros), les États-Unis, le Royaume-Uni, la Suisse, la Russie et la Turquie. Avec le Japon et la Norvège, ces marchés représentent 70 % des flux commerciaux de l’UE, et près des trois-quart des exportations de biens européens. Ces sept pays sont également les plus grands fournisseurs de biens importés par l’Union européenne.

Ce dernier classement vaut uniquement dans le domaine du commerce de marchandises et ne prend pas en compte le poids des services, qui n’est pas pris en compte dans les dernières données d’Eurostat. Leur intégration permet néanmoins de nuancer ce constat. Comme l’explique Politico, “le commerce entre pays ne se limite pas aux échanges de marchandises” . En se basant sur les premières données disponibles pour 2020, le média rapporte que le commerce de services entre l’UE et les États-Unis s’est élevé à 296,3 milliards d’euros sur les trois premiers trimestres de 2020, “soit cinq fois plus que le commerce des services entre l’UE et la Chine, qui s’est élevé à 53,3 milliards d’euros” sur la même période. En prenant en compte les services dans le commerce international, les Etats-Unis conserveraient ainsi leur position historique de premier partenaire.

Dans le cas de la Suisse et de la Norvège, les échanges sont facilités par leur présence au sein du marché commun, qui garantit la liberté de circulation des biens, services, capitaux et personnes en son sein.

Du côté du Royaume-Uni, ce sont en revanche les droits de douane et quotas qui sont inexistants malgré la sortie du pays de l’Union européenne et de son marché intérieur.

La carte ci-dessous, réalisée par l’office de statistiques européennes Eurostat, représente les principaux partenaires commerciaux de l’Union européenne pour l’année 2018.

Le Royaume-Uni étant encore membre de l’UE à l’époque, il n’apparaît donc pas comme partenaire extérieur, et est intégré dans les données de l’UE-28.

Partenaires commerciaux de l'Union européenne (c) Eurostat 2019

L’UE est le plus grand exportateur mondial de produits manufacturés et de services, et notamment le premier pôle touristique mondial. Selon la Commission européenne, 36 millions d’emplois européens, soit un travailleur sur sept, dépendaient en 2018 du commerce extérieur (pour l’UE à 28).

Parmi les États membres de l’UE, l’Allemagne possède de loin la plus grande part du commerce extra-européen. Elle totalisait ainsi 30 % des exportations européennes de biens à destination des pays tiers et plus d’un cinquième (22 %) des importations européennes en 2020. Elle était suivie par l’Italie (11 %), les Pays-Bas (10,4 %) et la France (10,2 %) pour les exportations de biens, et par la France (19,6 %), les Pays-Bas (12,6 %) et l’Italie (12,5 %) pour les importations.

Si l’Union a pu ces dernières années maintenir une position relativement forte dans le commerce de biens, tout en renforçant son rôle dominant dans le commerce des services malgré le ralentissement mondial entraîné par la crise économique de 2008, la pandémie de Covid-19 a provoqué une baisse drastique du volume des échanges (30 %) sur les mois de mars et avril avant de repartir à la hausse sur le reste de l’année.

La politique commerciale européenne

La politique commerciale de l’Union européenne est l’une des politiques communes les plus intégrées. Elle relève pour l’essentiel de la compétence exclusive de l’Union européenne, ce qui permet à l’UE de défendre ses intérêts internationaux d’une seule voix.

En matière commerciale, l’Union européenne est représentée par la Commission européenne auprès des Etats tiers (c’est elle qui négocie par exemple les accords de libre-échange) et des organisations internationales. Les Etats membres et le Parlement européen conservent toutefois des prérogatives importantes. Les premiers, à travers le Conseil de l’Union européenne, donnent mandat à la Commission pour la négociation des accords, sont consultés par cette dernière pendant le processus de négociation et décident de la signature et de la conclusion de ces accords (à la majorité qualifiée ou à l’unanimité selon les cas). Le second dispose quant à lui d’un droit de veto sur la ratification des accords.

Régie par les traités, la politique commerciale européenne s’efforce de contribuer “au développement harmonieux du commerce mondial, à la suppression progressive des restrictions aux échanges internationaux et aux investissements étrangers directs, ainsi qu’à la réduction des barrières douanières et autres” (article 206 TFUE). La libéralisation du commerce mondial est ainsi l’un de ses objectifs, rappelle la Commission européenne.

Dès l’origine, le traité de Rome de 1957 prévoit la réalisation d’un Marché commun et, à ce titre, d’une Union douanière. Celle-ci implique non seulement une liberté de circulation des marchandises entre les Etats membres, mais également des règles communes envers les pays tiers. En 1968, la Communauté économique européenne instaure alors un tarif douanier commun à tous les Etats membres, qui s’applique aux importations de marchandises franchissant les frontières extérieures de l’union.

L’un des axes principaux du commerce extérieur de l’UE est le développement des échanges bilatéraux avec les pays tiers, concrétisés ou non par des accords commerciaux, notamment de libre-échange.

A cet effet, la Commission européenne a entamé il y a quelques années des négociations avec un nombre croissant de pays. Des accords conséquents ont été conclus avec le Canada (CETA, entré en vigueur en septembre 2017), le Japon (JEFTA, en vigueur depuis février 2019), Singapour (en vigueur depuis novembre 2019) et le Vietnam (entré en vigueur le 1er août 2020). Plus récemment, un accord de principe a été conclu avec la Chine pour faciliter leurs investissements réciproques (CAI, 30 décembre 2020, il doit encore être signé et ratifié avant d’entrer en vigueur). D’autres sont en cours de négociation ou de modernisation avec le Mexique, l’Australie, la Nouvelle-Zélande…

Pour limiter l’impact du Brexit, un accord commercial a également été conclu avec le Royaume-Uni (TCA, 24 décembre 2020, entré en vigueur à titre provisoire le 1er janvier 2021).

A l’inverse, les négociations autour de certains accords sont pour l’instant au point mort. L’accord entre l’UE et le Mercosur, signé en juin 2019 mais pas encore en vigueur, est remis en cause par plusieurs pays européens, et notamment la France. Ceux-ci reprochent le manque de garanties environnementales de l’accord, notamment vis-à-vis du Brésil dirigé par le climatosceptique Jair Bolsonaro. De même, le projet de partenariat avec les Etats-Unis (TAFTA) a été enterré en 2016 par l’élection du président protectionniste Donald Trump.

Une autre dimension concerne la défense de l’Union européenne contre les pratiques déloyales de ses partenaires, qu’elle assure notamment via des instruments antidumping ou antisubvention. La Commission a notamment lancé en juin 2020 une consultation pour réviser sa doctrine commerciale, avec pour objectif de renforcer l’autonomie stratégique du continent. Elle entend ainsi développer de nouveaux instruments de contrôle des investissements et subventions étrangères susceptibles de créer une distorsion de concurrence au sein du marché intérieur.

Elle octroie par ailleurs un certain nombre d’avantages commerciaux aux pays en développement et moins avancés, à travers un système dit de “préférences généralisées” . Une aide qu’elle entend maintenir pour les aider à se remettre de la pandémie de Covid-19.

La carte ci-dessous, réalisée par la Commission européenne, présente les accords commerciaux de l’Union européenne avec des pays tiers (au 1er janvier 2021). Les pays en marron sont ceux avec lesquels l’UE a adopté de tels accords, en bleu foncé ceux dont l’accord doit encore être formellement adopté ou ratifié, en jaune ceux dont l’accord est en cours de négociation.

Cliquez sur l’image pour agrandir.

Les accords commerciaux de l’UE au 1er janvier 2021

Source : DG Trade de la Commission européenne – Twitter @Trade_EU

Débats et perspectives

Le commerce extérieur européen génère son lot de débats et de polémiques. Une partie de l’attention est portée sur les questions relatives à la mondialisation, au libre-échange et au protectionnisme.

Les controverses se sont un temps focalisées sur les accords de libre-échange négociés par la Commission européenne avec certains pays tiers, à commencer par les Etats-Unis (TTIP/TAFTA) puis le Canada (CETA). D’un côté, l’Union européenne promeut les gains économiques de tels accords. De l’autre, un certain nombre de voix se sont élevées pour critiquer l’opacité des négociations, les risques d’une concurrence trop importante pour l’agriculture européenne, ceux pour l’environnement ou encore ceux liés à l’instauration de tribunaux d’arbitrage privés pour régler les litiges commerciaux entre Etats et entreprises. Ces accusations ont entraîné un certain nombre de réponses en Europe comme en France : les tribunaux ont été réformés pour garantir l’indépendance des juges (la première de ces “Cours internationales d’investissement” , ou “ICS” , a été mise en place à travers l’accord UE-Mexique), les mandats de négociation sont désormais publics et les exigences environnementales vis-à-vis des partenaires commerciaux ont été renforcées. De fait, les accords signés par la suite (Japon, Singapour…) ont suscité une opposition beaucoup plus faible.

Dans sa nouvelle stratégie commerciale datée du 18 février 2021, la Commission européenne annonce vouloir faire du respect des accords de Paris sur le climat une composante essentielle de ses futurs accords commerciaux. Elle propose également de s’assurer que les importations soient conformes aux normes européennes (y compris en matière environnementale), justifiant que l’UE prenne des mesures de sanction à leur encontre le cas échéant, selon l’exécutif européen. Plus globalement, elle souhaite renforcer “la capacité du commerce à soutenir les transitions numérique et climatique” et être “plus ferme” sur “la mise en œuvre et le contrôle de l’application de ses accords commerciaux, la lutte contre le commerce déloyal et la réponse aux préoccupations en matière de durabilité”.

Par ailleurs, les intérêts européens sont parfois exposés à la concurrence déloyale de pays tiers, notamment la Chine. L’Union européenne s’efforce ainsi de rétablir une meilleure réciprocité dans ses échanges extérieurs. Un point sur lequel elle a fait des pas importants ces dernières années, comme avec le renforcement de ses instruments de défense commerciale (2016 et 2020) ou un filtrage accru des investissements étrangers (2019).

Elle cherche à aller plus loin à l’avenir, comme l’y invite notamment la Commission européenne dans son document de réflexion sur la mondialisation, dans son livre blanc sur les subventions étrangères ou encore dans sa communication pour réviser sa politique commerciale. Dans le même temps, l’ascension des pays émergents offre de nouvelles opportunités de développement pour l’Union européenne, qui multiplie ainsi les négociations commerciales avec ces derniers.

Enfin, la remise en question du multilatéralisme, déjà entamée avec l’immobilisation de l’Organisation mondiale du Commerce (OMC) dans les années 2000, s’est fortement accentuée avec la présidence américaine de Donald Trump. L’Union européenne a dû faire face à la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, et réagir à plusieurs relèvements des droits de douane américains la visant expressément, en faisant de même sur certains produits américains et en saisissant l’Organe de règlement des différends de l’OMC.

Parallèlement, elle mène une politique active, auprès des Etats-Unis et du Japon, pour réformer l’OMC. Elle souhaite que l’organisation prenne mieux en compte le climat et le numérique, lutte plus efficacement contre les distorsions de concurrence et rétablisse son système de règlement des différends. Avec le changement d’administration à Washington en 2021 – plus tournée vers le multilatéralisme – et la nomination de Ngozi Okonjo-Iweala comme nouvelle directrice générale de l’OMC, l’ambition européenne pourrait rencontrer un écho favorable.



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