La gauche française face à la catastrophe de l’élection présidentielle d’avril


ON L’ANNIVERSAIRE DE Décès de François Mitterrand le 8 janvier Anne Hidalgo, maire de Paris, est allée sous une pluie battante déposer des fleurs sur sa tombe. Elle cherchait « l’inspiration » du défunt président socialiste, mais cela ressemblait plus à un requiem pour la candidature actuelle du parti. Les sondages montrent que Mme Hidalgo, la candidate des socialistes, n’a remporté que 4% au premier tour de l’élection présidentielle française en avril. Un résultat aussi mauvais non seulement la disqualifierait du second tour, mais n’atteindrait pas le seuil de 5% permettant aux contribuables de rembourser la moitié de ses dépenses de campagne.

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Qu’est-il arrivé à la gauche française autrefois puissante ? Sous la Cinquième République, le grand vieux Parti socialiste s’est doté de deux présidents (Mitterrand et François Hollande) et de législations sociales marquantes, dont l’abolition de la peine de mort en 1981 et la légalisation du mariage homosexuel en 2013. Il y a dix ans, il contrôlait la présidence. , les deux chambres du parlement et la plupart des régions et des grandes villes. En Mme Hidalgo, il a un maire de renommée internationale, félicité pour avoir cédé des pans entiers du centre de Paris aux cyclistes et aux joggeurs. Le Parti vert français, avec lequel les socialistes gouvernent souvent, a aussi un candidat présentable, Yannick Jadot. Son grand sujet, le changement climatique, fait constamment l’actualité.

Pourtant, ni Mme Hidalgo, ni M. Jadot, ni aucun des candidats les plus à gauche – dont Jean-Luc Mélenchon, un incendiaire de gauche de 70 ans, et une poignée d’autres anticapitalistes et communistes – n’ont actuellement aucune position chance d’atteindre le second tour.

Le problème pour la gauche française est triple. Premièrement, trop de candidats ont fragmenté le vote. Aucun ne semble avoir l’influence ou le charisme nécessaires pour rallier les autres derrière un seul candidat. Mme Hidalgo avait soutenu l’idée d’une « primaire citoyenne » comme moyen d’y parvenir. Prévu du 27 au 30 janvier, il s’agit d’un vote en ligne non contraignant proposé par 130 000 supporters de base comme moyen de mesurer le soutien aux différents candidats, qu’ils le veuillent ou non. Mais M. Jadot soutient, assez raisonnablement, qu’il a déjà remporté la primaire de son propre parti et qu’il n’a pas l’intention de tenir compte du résultat. M. Mélenchon dit que tout cela n’est pas son problème.

Deuxièmement, la gauche française dominante a perdu la classe ouvrière. Sa base est désormais constituée en grande partie de citadins et d’employés du secteur public. C’est trop étroit pour gagner facilement les élections nationales. Dans le passé, Mitterrand a habilement lié les socialistes au Parti communiste français pour s’assurer le vote des cols bleus. Désormais, la plus grosse part de ce vote revient à la nationaliste Marine Le Pen : 33 % des cols bleus la soutiennent pour la présidence, à côté de 3 % pour Mme Hidalgo. Ces électeurs veulent une ligne plus dure sur la loi et l’ordre. Le cyclisme, l’un des problèmes emblématiques de Mme Hidalgo, peut être populaire dans le centre de Paris et dans les villes gérées par les écologistes comme Bordeaux. Ailleurs, les électeurs dépendent de leur voiture et n’apprécient pas qu’on les culpabilise.

Troisièmement, la France a viré à droite. Aujourd’hui, 37 % des électeurs se disent de droite, en hausse de quatre points depuis 2017, à côté de 20 % qui se disent de gauche, en baisse de cinq points sur la même période. En tant qu’ancien ministre de l’Economie dans un gouvernement socialiste, Emmanuel Macron a puisé en 2017 dans la gauche modérée pour construire son nouveau parti centriste lorsqu’il s’est présenté à la présidence. Beaucoup de ces électeurs ont ensuite été déçus par ses réductions d’impôts pour les riches, mais depuis la pandémie, ils sont devenus moins hostiles, explique Chloé Morin, une ancienne conseillère socialiste aujourd’hui à la Fondation Jean-Jaurès, un groupe de réflexion : « La faiblesse du gauche signifie que les électeurs du centre-gauche pensent qu’ils pourraient aussi bien voter Macron pour écarter la droite et l’extrême droite.

« Je n’abandonne pas », insiste Mme Hidalgo, qui soutient que les sondages sous-estiment le soutien à la gauche. Elle reproche à M. Macron de déstabiliser le système des partis. Mais certains, même au sein du Parti socialiste, pensent que la solution à leurs problèmes réside dans une autre candidate potentielle : Christiane Taubira, une ancienne ministre de la justice populaire de Guyane française qui est une sorte d’icône à gauche. Elle dit qu’elle se présentera à la présidence si elle remporte la « primaire citoyenne ». À moins que certains des autres ne se retirent alors, la candidature de Mme Taubira ne fera que fragmenter davantage le vote.

Alors que les candidats se chamaillent sur la manière de se présenter aux élections, ils omettent de dire au public ce qu’ils feraient s’ils le gagnaient. Pourtant, la France doit faire face à de grands problèmes politiques. Il s’agit notamment de savoir comment intégrer les minorités, réduire les inégalités et protéger les pauvres des fardeaux de la transition verte, à un moment où les dépenses publiques ont atteint un niveau exceptionnel de 62 % PIB, le plus haut niveau du UE. Si la gauche a un avenir en France, les candidats de cette année réussissent bien à le camoufler.

Cet article est paru dans la section Europe de l’édition imprimée sous le titre « Unfashionably gauche »

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