Les femmes arabes dirigent la « nouvelle génération » dans la réalisation de films documentaires


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El-Gouna (Egypte) (AFP) – Aux côtés des célébrités qui défilent sur le tapis rouge des festivals de cinéma en Egypte, puissance traditionnelle du cinéma régional, les jeunes réalisatrices arabes s’imposent avec des documentaires abordant des sujets allant du féminicide à la révolution.

Faisant une pause dans son réseautage au Festival du film d’El-Gouna sur la mer Rouge en octobre, l’actrice et réalisatrice irakienne Zahraa Ghandour, 30 ans, a parlé de son long métrage documentaire « Femmes de ma vie ».

« Le thème principal est la vie et la mort des jeunes femmes et filles en Irak. Il explore comment la société irakienne traite le fémicide comme si c’était normal », a-t-elle déclaré à l’AFP.

Ghandour a déclaré qu' »au cours des dernières années, une nouvelle génération est apparue dans les années 90 et 2000 avec une nouvelle direction », en particulier après les manifestations d’octobre 2019 appelant au renversement de la classe dirigeante en Irak.

« Nous voulons nous libérer des stéréotypes dans lesquels le cinéma mondial nous enferme », a-t-elle déclaré.

« C’est comme s’il y avait des tendances et ils (les bailleurs de fonds internationaux) veulent que nous nous inscrivons dans ces directives de financement », a déclaré Ghandour.

L'actrice et réalisatrice irakienne Zahraa Ghandour
L’actrice et réalisatrice irakienne Zahraa Ghandour Khaled DESOUKI AFP

« Et si je veux faire un film d’horreur ? Je veux faire ce que je veux tant qu’il est de haute qualité. »

« Femmes de ma vie », dans lequel elle incarne l’un des personnages principaux, suit la mort horrible d’une jeune femme soupçonnée d’avoir été exécutée par des parents masculins.

« En tant qu’Irakiens en général, nos vies sont instables mais le meurtre ciblé de femmes en particulier (…) ne peut pas être banalisé », a-t-elle déclaré.

Tableau riche

Pour Rafia Oraidi, une productrice palestinienne indépendante, le paysage fracturé de la vie sous l’occupation israélienne offre un riche tableau de récits.

Travaillant avec la cinéaste américano-palestinienne Hind Shoufani sur « They Planted Strange Trees », l’équipe internationale a apporté la touche finale à la post-production.

Producteur de cinéma palestinien indépendant Rafia Oraidi
Producteur de cinéma palestinien indépendant Rafia Oraidi Khaled DESOUKI AFP

« C’est un voyage méditatif se déroulant en Galilée qui retrace la vie quotidienne des habitants du village d’où est originaire le réalisateur », a déclaré Oraidi.

Oraidi mentionne des réalisateurs palestiniens indépendants tels que Hany Abu-Assad et Elia Suleiman dont les films ont remporté des nominations aux Oscars et des prix à Cannes.

« Sans l’attention personnelle des cinéastes, la patience et la persévérance… malgré les conditions dans lesquelles nous vivons, nous n’aurions pas un seul film à l’écran », a-t-elle déclaré.

« Nous voulons montrer qu’il y a beaucoup d’autres histoires en Palestine en dehors de la guerre, de la destruction et de l’occupation », a déclaré Oraidi.

Elle a déclaré que le plus grand défi pour les cinéastes arabes indépendants était le manque d’installations telles que des studios sur mesure.

Cela « gonfle le budget et nous sommes obligés de nous associer à d’autres coproducteurs pour obtenir des financements », a-t-elle déclaré.

S’en sort mieux qu’Hollywood

La scénariste et réalisatrice tunisienne Fatma Riahi est aux prémices d’un long métrage, « Mon père a tué Bourguiba », qui tente de « raconter l’histoire de la Tunisie au cours des 30 dernières années à travers un récit biographique et personnel ».

Centré sur son père, le documentaire suit son rôle dans un plan visant à renverser le régime d’Habib Bourguiba lors d’un coup d’État militaire de 1987 et ses répercussions actuelles après la révolution de 2011 qui a renversé son successeur Zine El Abidine Ben Ali.

Scénariste et réalisatrice tunisienne Fatma Riahi
Scénariste et réalisatrice tunisienne Fatma Riahi Khaled DESOUKI AFP

« J’espère que le film… donnera une lecture alternative… de l’histoire tunisienne… des coups d’État aux révolutions en passant par ce que nous vivons actuellement sous (président) Kais Saied », a déclaré la réalisatrice d’une trentaine d’années.

Saied lui-même a limogé le gouvernement et s’est emparé de vastes pouvoirs le 25 juillet, évoquant une « menace imminente » pour le pays.

« Pour les femmes dans le cinéma arabe, le nombre de réalisatrices par exemple est toujours inférieur à celui des hommes. Ce n’est pas seulement un phénomène régional mais aussi mondial », a déclaré Riahi à l’AFP.

Mais le cinéma arabe semble se porter mieux qu’Hollywood, où sur les 250 plus gros films sortis l’année dernière, seuls 18% ont été réalisés par des femmes.

Une étude de 2019 de la Northwestern University à Doha, par exemple, a révélé qu’environ 50 % de tous les cinéastes du monde arabe étaient des femmes.

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